A même le sol, gît Me (Connected) un assemblage composée de deux types d’éléments: des bâtons en bois tourné et des tubes en plastique. En les associant, l’artiste Marlie Mul met en évidence les différences de textures et de fonctions de ces matériaux. Elle oppose ainsi la raideur opaque à la souplesse transparente. Marlie Mul associe, relie, connecte des éléments entre eux pour faire ressortir leurs qualités intrinsèques. Ainsi, elle donne à voir la façon dont toute qualité se définit par rapport à une autre.
Marlie Mul joue également sur l’illusion des matériaux. Les bâtons de bois tourné évoquent nécessairement l’univers industriel. Cependant, ils sont recouverts d’une ornementation, exécutée par la main de l’artiste, qui rappelle les veines et les nÅ“uds du bois naturel. Loin de s’essayer au trompe-l’Å“il, la décoration prend des couleurs irréelles (bleues, jaunes et rouges). N’empêche, la question de l’authenticité et du savoir-faire est ici en jeu.
La modularité des éléments laisse penser que l’assemblage pourrait continuer indéfiniment, intuition qui ne tarde pas à se révéler juste avec, au premier étage, d’autres assemblages du même type bien que composés différemment. De nature fragmentaire, les créations de Marlie Mul illustrent le principe de l’articulation. Elles donnent à voir la manière dont les parties s’articulent à l’ensemble d’une structure. Elles donnent à penser la pratique de la sculpture et le moment de sa fabrication.
La sculpture intitulée Fraîche comme une rose est différente d’un point de vue structurel. Réalisée spécifiquement pour le lieu, elle prend la forme d’un arc qui s’étire du sol au plafond. Celui-ci se divise en trois parties, reliées entre elles par deux joints joufflus de mousse de polyuréthane. Il étonne: entièrement fait de polystyrène, il est loin de remplir sa fonction architecturale! Léger comme l’air, il cache sa vulnérabilité et son absence de raison d’être.
Diplômée et enseignante en théorie de l’architecture, Marlie Mul repense l’architecture au moyen de la sculpture. En privilégiant des matériaux peu conventionnels, elle bat en brèche l’idée que certains matériaux sont plus nobles que d’autres. En camouflant des matériaux peu coûteux sous l’apparence de matériaux nobles, elle met en lumière l’influence des questions économiques. Ses précédentes réalisations — des vases en polystyrène verni imitant le bronze — allaient dans ce sens.
C’est particulièrement l’architecture moderne qui inspire l’artiste. On le sentait déjà dans ses sculptures de mobilier abstrait, réalisées à l’aide de formes modulaires rectangulaires en polystyrène. Leur style évoque bien sûr celui du Bauhaus et, à travers lui, les alternatives qu’ont dû trancher les architectes de la première moitié du XXe siècle: la standardisation ou l’artisanat, la vitesse d’exécution ou la monumentalité.
— Marlie Mul, Me (connected), 2010. Bois tourné, encres acrylique, vernis, tubes en plastique. Approx. 370 x 115 cm
— Marlie Mul, Fraîche comme une rose (curvature with two connection parts), 2010. Polystyrène, peinture, mousse de polyuréthane. Œuvre «site specific»
— Marlie Mul, She (angle), 2010. Bois tourné, tubes en plastique. 90 x 95 x 130 cm
— Marlie Mul, She (parallel), 2010. Bois tourné, tubes en plastique. 75 x 35 x 75 x 35 cm
— Marlie Mul, Sticks (Blue, Yellow, Terracotta), 2010. Bois tourné, encres acrylique, vernis. 82 x 4 cm