Ce sont des fragments de chair sanglante, d’inquiétantes flaccidités, des transparences humides et glissantes qui « nous obsèdent autant qu’elles nous révulsent », selon les mots du curateur François Cheval.
Par-delà le beau, le vrai
Lucile Boiron ne cherche ni à plaire ni à choquer : elle montre des chairs nues, des entrailles palpitantes, des moiteurs vivantes. Elle fait fi de la beauté et des bienséances, et nous rappelle ce que nous ne voulons plus voir : la réalité biologique, sanglante, des corps. « Womb », ce sont les entrailles, celles qui nous rendent si forts et si fragiles, où grandissent les enfants, où se cachent les secrets de notre vie et de notre mort.
Ses photographies montrent, sans même dévoiler, sans commenter, la réalité de corps déchirés, déchiquetés, fripés, avec leurs ouvertures et leurs cicatrices, dans un rappel aux fluides de la naissance autant qu’à la décomposition future. La varice et la vermine, le mollusque et la blessure, la peau et la bave s’y mélangent, dans une sensualité repoussante mais pleine de sincérité.
L’intimité intérieure
Il y a, dans cette plongée intime, une jubilation cannibale, celle d’ouvrir, d’arracher, de mettre à nu un monde sensible, chaud et vivant. « L’ambivalence séduisante du laid et du répugnant suscite un plaisir à rejouer l’animalité et la jouissance morbide de la contemplation » commente François Cheval. Et c’est bien cette ambivalence qui rend les photographies de la série Womb si captivantes, si intimes et si vraies.
Ces gros plans aux accents baudelariens ne peuvent laisser indifférents. Ils murmurent au spectateur « Les formes s’effaçaient et n’étaient plus qu’un rêve / Une ébauche lente à venir », ils suggèrent sans mettre en scène, et suscitent une réaction plus instinctive que réfléchie.
Une exposition à retrouver à la galerie Madé dans le cadre du parcours Photo Saint-Germain