Within the Context of Reason

Communiqué de presse
Hoon Garwa
Within the Context of Reason

A chaque exposition, le travail d’Hoon Garwa se révèle plus complexe, plus personnel et plus attachant. On croyait le connaître, le situer. D’exposition en exposition, son oeuvre gagne en force et en pertinence. Attestant notre humanité, signant notre identité, s’usant, se ridant, les images anticipent notre propre mort. Or, ne rien admettre comme allant de soi, ne rien présupposer, ce n’est finalement rien d’autre que s’interroger constamment au sujet de nos connaissances, refuser de les aborder naturellement, c’est-à-dire naïvement, sans s’interroger sur leur rapport aux choses. Distanciant le sujet de son double, les oeuvres d’Hoon Garwa rééditent cette ruse, leur fonction étant de compenser l’absence.

L’attitude naturelle, en effet, ne se soucie pas des problèmes de la possibilité de la connaissance. En d’autres termes, vouloir l’absence de présupposition, c’est vouloir l’évidence complète. Éloquente, l’exposition «Within the context of reason» laisse transparaître les passions de l’âme.

L’attitude artistique, par opposition à l’attitude naturelle, doit donc viser sans cesse ce que l’on pourrait appeler une évidence apodictique obtenue par l’exposition d’une preuve nécessaire. C’est bien ce qui est en jeu chez le jeune artiste coréen. Très proche, sans la revendiquer forcément comme telle, de l’attitude improvisatrice des expressionnistes abstraits, il déploie une pratique fondée sur une chaîne de décisions spontanées qui doit mener à la révélation plastique de l’oeuvre finie. En parfaite adéquation avec le credo greenbergien d’une oeuvre qui tire son sens du processus de tâtonnement qui a présidé à la découverte de son achèvement, Hoon Garwa indique qu’il procède à l’ajustage des éléments puis regarde le résultat. La perception constituant en objet le tout autre, le réduisant, l’esthétique doit donc être dépassée vers l’éthique. Pour bien comprendre le rôle de l’époché dans une telle démarche, et par suite, pour comprendre l’intérêt de la réduction phénoménologique, il est besoin de rappeler que toute oeuvre d’art, en plus de ses qualités formelles, en plus de contenir implicitement une réflexion sur elle-même, doit être confrontée à la multiplicité des pratiques qui composent la trame du contexte architectural, social et idéologique qui lui est associé en contrepoint.

En ce sens, le travail d’Hoon Garwa vise à produire un certain nombre de décalages, à ouvrir le champ des possibles. Cette remise en cause n’est jamais improvisée ni volontariste. C’est dire donc que les sérigraphies exposées à Bourréac doivent trouver en elles leur propre justification, leurs propres fondements. Leur discrétion volontaire, une manière de neutralité qui les habite, ne parviennent toutefois pas à masquer ce que l’on pourrait finalement appeler leur portée politique: c’est bien une communauté possible (ou impossible) qui est imaginée, un peuple absent ou à venir dont les contours déjà précis sont tracés par ces formes agissantes.

Au sujet des oeuvres présentées on peut dire tout simplement que la postulation subjective de l’intention artistique, objectivement fondée ou non, agit sur la relation à l’oeuvre. Hoon Garwa est pleinement concerné par la théorie de la connaissance selon laquelle ce qui est perçu est tributaire des conditions de la perception et de la façon dont l’observateur commente ces conditions. Conditions qui articulent ici une problématique de la durée des images.

Hoon Garwa puise superbement dans l’extrême fragilité des images et organise le renouvellement d’un questionnement qui prend un caractère essentiellement dynamique. Tout se ramène ainsi à une continuelle alternance d’apparitions et de disparitions, d’ancrages et de décrochages, de figurations et d’abstractions qui s’accomplit dans cette magnifique exposition.