Maïder Fortuné
Whispering in distant chambers
Pour sa première exposition personnelle à la galerie Martine Aboucaya, Maïder Fortuné présente un ensemble d’oeuvres inédites réunies sous le titre Whispering in distant chambers / Murmures dans les chambres lointaines. Lieu d’ancrage et de rayonnement des pièces présentées, le titre de l’exposition renvoie à celui d’un des derniers scénarios, non réalisés, de Jacques Tourneur de 1966, dans lequel deux hommes mettent en place une expédition d’une grande complexité technologique dans un château hanté d’Écosse, afin d’y établir les preuves qui valideront leurs points de vues divergents sur l’existence réelle ou non des fantômes. À travers différents médiums liés, pour l’essentiel, à la fabrication des images, Whispering in distant chambers invite à faire l’expérience de fictions de présences virtuelles, comme surgies de la matière même qui les construit.
L’ensemble des pièces vise une image mentale qui s’affranchit du récit pour devenir le support d’une projection active du regard, de l’imaginaire, succeptible d’ouvrir le chemin d’une anamnèse.
Parmi les oeuvres exposées, Characters est une collection qui rassemble un ensemble de boîtes. Chacune d’elle contient les caractères qui correspondent au texte énoncé par un personnage de théâtre. La somme de ces caractères représente le corps du personnage, un corps de voix, un corps de texte. Les quatre personnages présentés ici Hamlet, Antigone, Doctor Faustus et Salome sont les premiers réalisés de la collection.
Death scene est le titre d’une partition musicale extraite d’un ouvrage de 1913 intitulé Sam Fox Moving Picture Music. Son auteur J.S. Zamecnik y proposait des pièces de musique qui pourraient servir toutes les scènes de films imaginables. : War Scene, Hurry Music (for mob or fire scenes), Oriental Veil Dance, Cowboy Music, Storm Scene, Sailor Music, Mysterioso-Burglar Music, Fairy Music, Funeral March,Death Scene etc… Pour les pianistes de cinéma, cet ouvrage était la manière de faire face au nombre croissant de films muets qui ne leur permettait pas de se familiariser avec les films qu’ils avaient à accompagner et d’apprendre des compositions musicales trop complexes. Simples à jouer et aptes à être abrégées ou allongées selon les besoins. Les pièces de Zamecnik pouvaient elles, être interprétées par des pianistes qui les jouaient dans le noir, tout en regardant le film du coin de l’oeil.
L’image présentée est extraite du film de Albert Lewin de 1945 Le Portrait de Dorian Gray. Elle correspond à l’instant où le jeune homme, bouleversé par les propos de Lord Henry, conçoit le vœu de son éternité. La vidéo projetée est celle d’un arrêt sur image. Elle déplace dans une éternelle durée, l’arrêt de mort que signerait l’équivalence de ce geste sur le film original en pellicule et rejoint par là , la réalisation paradoxale du vœu de Dorian Gray.
critique
Whispering in Distant Chambers