Eva Nielsen
Walden
Dominique Fiat est heureuse de présenter la deuxième exposition personnelle d’Eva Nielsen, née en 1983. Ses récentes peintures se sont ouvertes un nouvel espace au sein du champ pictural. Simultanément intérieur et extérieur, cet espace est celui que la répétition décalée du même engendre au sein des diptyques Silo, Nod et Field. C’est celui qui, après les béances des peintures antérieures et des dessins (exposés ici pour la première fois), génère une échappée réelle, née de l’introduction d’un «vide» au sein du tableau. C’est celui qui, filtrant notre perception, consciente du simulacre, embrasse dans un même mouvement le réel et le médium qui le représente. Un réel où des structures monolithes, plantées au coeur de zones désertiques, viennent se poser auprès des jeux d’enfants précédemment peints.
Un nouvel espace et une autre architecture deviennent ainsi les éléments grâce auxquels travaille notre regard. Puis se perd, dans ces formes circulaires et imposantes : Babel où la répétition décalée du même n’est plus figurée mais portée toute entière par le sujet.
Ce nouvel espace, c’est également celui du Walden de Henry David Thoreau (1854). En y «sérigraphiant» dans son esprit les oeuvres de Caspar David Friedrich ou d’Andrew Wyeth, Eva Nielsen a fait de ce récit d’un espace à part, à la fois intérieur et réel, l’une des matrices de ses nouvelles toiles. À la minutieuse observation de la nature et des rapports entre forces urbaines et naturelles proposée par Walden – et pour lesquels le paysage périurbain contemporain au sein duquel travaille Eva Nielsen constitue un terrain d’observation privilégié – s’ajoute ici le combat entre l’espace peint et l’espace non peint : la sérigraphie qui vient envahir le tableau, le vide qui en ruine l’autonomie.
Cet espace enfin, c’est celui, trouble, d’Ellis Island (1 et 2). Dans cette évocation d’un autre espace singulier, intermédiaire, le nuage abstrait prolifère sur une figuration qui disparaît, modifiant les rapports entre les plans, les échelles et les techniques, faisant de ces toiles les détails d’une Babel, accrochée non loin.
La peinture d’Eva Nielsen s’est permise une nouvelle action : celle de brouiller les formes, la linéarité de la représentation comme de la présentation. Et cela, grâce à l’introduction d’«outils visuels» renouvelés qui, en association avec ceux élaborés depuis plusieurs années, lui permettent de poursuivre son chemin en peinture.
critique
Walden