François Loriot, Chantal Mélia
Vu-pas-vu
En 1992, l’activité artistique du duo constitué par Chantal Mélia et François Loriot fut modifiée par la découverte fortuite d’une image provoquée par la lumière sur des objets.
Depuis, ils n’ont eu de cesse de renouveler cette magie et de débusquer le hasard afin d’en exploiter les ressources de manière créative. En observant le monde dans ses grands et petits états, puis en associant réflexions en chaîne, dialectique et manipulations, ils composent des installations d’où naissent des images.
Entre dessin, photographie, sculpture et installation, leurs machineries poétiques ont pour révélateur commun la lumière, qu’elle vienne d’une lampe, des images de la télévision ou du soleil.
Du chaos de l’assemblage d’objets naît une imagerie virtuelle de type photographique, fixe ou animée, développée sur de nombreux registres.
Enfin les titres, jeux de mots savoureux ou références appuyées, sont la touche finale de leurs oeuvres. Loriot et Mélia brassent joyeusement les références, entre l’histoire de l’art très bien assumée et les clins d’oeil à l’imagerie populaire ou enfantine, au cinéma ou au dessin animé.
Faisant feu de tout bois, ils trouvent partout prétexte à créer un petit théâtre d’images tragi-comiques, grinçantes ou burlesques, souvent poétiques et toujours magiques. Pourtant un regard ironique et amusé sur notre société, ils en dénoncent les travers et les failles.
L’exposition rend compte à travers une trentaine d’oeuvres de près de vingt ans de création à quatre mains. Mêlant pièces plus anciennes, emblématiques ou fondatrices, et d’autres plus récentes ou inédites, elle propose un parcours entre leurs différents registres.
Les oeuvres les plus connues partent d’un assemblage hétérogène d’objets traversés par la lumière, qui fait naître une image virtuelle au mur ou au plafond (Jour de fête, 1993; Le Diable probablement, 1993; Miracle pour un antiseptique, 2001).
Certaines d’entre elles associant objets détournés et moteur créent des images animées (Ready-made in China, 2000), alors que la lumière traversant de simples emballages plastiques déchirés provoque des visions étonnantes, parfois rehaussées de quelques coups de crayon qui font basculer la vision (Emballages perdus, 2005).
D’autres installations détournent l’énergie lumineuse des écrans cathodiques vus à travers le filtre d’un écran ajouré (Détournement de fonds, 2005). Plus récemment, de simples photographies de trottoirs et de leurs déchets variés sont prétexte à la série des Aléas (2009-2010), qui en version éteinte/allumée provoquent de surprenantes visions.
Enfin, le coeur de l’exposition est occupé par une installation à grande échelle, La Salle des batailles (2010), conçue spécialement pour l’événement. Elle conjugue plusieurs dispositifs chers aux artistes et associe des objets banals détournés, à la télévision et à la télésurveillance, et se veut une gigantesque «parodie de la mort en direct, une pantomime des grandes batailles», une grande toile lumineuse et animée qui rejoue en se moquant le théâtre des guerres du monde que banalise la télévision.
« Une critique de l’image par l’image » qui résume bien le travail plastique des deux artistes.