Centre Pompidou
Face aux Å“uvres : Le Mouvement des images
Récit
Après la Seconde Guerre mondiale, le cinéma de fiction – essentiellement le cinéma de genre hollywoodien – fait massivement son entrée dans le travail des plasticiens en même temps que la culture populaire obtient définitivement droit de cité sur la scène artistique.
Dans les années 1960, les artistes trouvent dans la science-fiction ou le cinéma fantastique, plus que dans le cinéma d’auteur, un nouveau matériau émotif et perceptif. Le 19 novembre 1971 à 19h45, Chris Burden se fait tirer une balle dans le bras. La performance est aussi légendaire que le film qui en témoigne est anti spectaculaire. Il n’y a que huit secondes d’image. La caméra super-8 émet un bruit caractéristique au moment de son enclenchement, l’image apparaît, le coup de feu part, l’artiste s’avance en se tenant le bras. L’écran redevient noir, une cartouche vide fait du bruit en tombant sur le sol.
«Je pense que le public américain a toujours été fasciné par les photographies de vrais morts ou de gens en train de mourir, explique Robert Longo ; lorsque les films et la télévision ont fait leur apparition, ils ont donné une version stylisée de ces » Pour réaliser la série de dessins «Men in the Cities, 1980-1999», en référence au cinéma d’action contemporain, Longo dirige ses modèles comme un réalisateur ses acteurs : il les emmène sur des toits d’immeubles, leur envoie des projectiles et les photographie en perte d’équilibre. À partir des photos projetées en grand format, il élabore ses figures par un travail de montage et de détourage. Dans l’écart entre les corps suspendus de Robert Longo et la rugosité des images de Burden, entre figure idéale et réalité documentaire, se déploie tout l’arsenal stylistique du «cinéma de genre».
Dans les années 1920, Francis Picabia célèbre dans les récits du cinéma d’action un dispositif anti-esthétique susceptible d’opposer à la culture visuelle «aristocratique» un système de contre-valeurs. «Ce que j’aime, écrit-il, c’est la course à travers le désert, les savanes, les chevaux en nage. Le cow-boy qui entre par les fenêtres du bar-saloon, l’éclatement des vitres, le verre de whisky vidé à angle droit dans un gosier rude et les deux brownings braqués sur le traître.»
Une scène de meurtre, une piscine couleur azur sous le soleil de la Californie, une Cadillac dont le klaxon joue la musique du Parrain, des abstractions cinématographiques, La Moindre Résistance, 1981, de Peter Fischli et David Weiss, met en scène les deux artistes sous les traits d’un rat et d’un ours géants qui semblent radicaliser, dans une fable policière aux résonances métaphysiques, le programme de Picabia.
En 1936, Eli Lotar prend des photos sur le plateau de tournage d’Une partie de campagne de Renoir. Il multiplie les points de vue, double ceux de la caméra, adopte des angles inaperçus à l’écran : ces fragments de récit sont l’amorce d’une narration plus vaste, celle du film en train de se faire.
En revanche, les Two Impossible Films, 1995-97, de Mark Lewis prennent pour argument deux projets qui n’ont jamais vu le jour : une adaptation par Eisenstein du Capital de Marx et un projet de film, une histoire d’amour, que Samuel Goldwyn espérait produire avec le concours improbable de Freud. Lewis réalise en cinémascope et dolby stereo les génériques de début et de fin de ces films, déconstruction ironique du récit du cinéma hollywoodien.
Infos pratiques
> Lieu
Centre Pompidou — Musée national d’art moderne
Place Georges Pompidou. 75004 Paris
M° Rambuteau ou Châtelet-Les Halles
> Horaire
15h30
> Contact
T. 01 44 78 12 33
www.centrepompidou.fr
L’exposition est présentée jusqu’au 29 janvier 2007.