Communiqué de presse
Eric Mangion, Nicolas Moulin, Hans Ulrich Obrist
Vider Paris
Comment vider Paris ? En procédant de la manière la plus simple ; en retranchant systématiquement des rues de la capitale toute trace d’occupation humaine. Nicolas Moulin s’est exercé à ce jeu de patience, Monopoly obsessionnel et tentaculaire dont la règle unique consiste à effacer chaque témoin physique de la présence de l’homme. Image après image, les gommages successifs font apparaître une ville à la physionomie jamais perçue, une image qui hésite entre le dessin d’architecture et la photographie des ruines, entre le souvenir de Rome et les mises en scène photographiques qu’ont aimées les architectes modernes – entre le Paris du plan Voisin et le Louvre d’Hubert Robert.
La manipulation digitale de l’image procède plus par bouchage que par effacement, presque toujours à hauteur d’homme. Pourtant, les niveaux que l’artiste a rendus aveugles – rez-de-chaussée, premier étage ou entresol – ne nous apparaissent pas immédiatement pour ce qu’ils sont. La force de l’habitude nous fait douter de leur évidente permanence. Elle voudrait nous faire croire, d’abord, à des murailles fictives, aux décors d’un chantier colossal. Notre premier mouvement est un mouvement de recul, avant de nous reprendre et de saisir notre méprise – car le peu de réalité de ces images, qui se dévident une à une, sans ordre, et dont le fond sonore illustre l’immobilité, se révèle d’une grande brutalité.
Nicolas Moulin
Nicolas Moulin, né à Paris en 1970, travaille à Paris et Berlin.
S’inspirant du cinéma et de la littérature de science-fiction, Nicolas Moulin ne cesse de déambuler à la recherche de matière sonore et visuelle afin de construire des univers étranges. Depuis plusieurs années, il utilise la photographie et la vidéo, saisissant le réel, pour ensuite le modifier avec des moyens techniques, du plus simple au plus sophistiqué. Basculant des points de vue pour transformer des architectures en plates-formes désertiques, ses images usent de leur hallucinatoire effet de réel pour s’immiscer dans les représentations mentales du futur que le monde occidental a échafaudé, travaillant à instiller de la fiction dans le réel.
Eric Mangion
Eric Mangion est directeur du Frac Provence Alpes Côte d’Azur et critique d’art.
Hans Ulrich Obrist
Hans Ulrich Obrist est commissaire d’exposition à l’ARC/Musée d’Art moderne de la Ville de Paris.