Vers le sous-bois des Aurores

Arnaud Dezoteux
Vers le sous-bois des Aurores

«Depuis le sacre qui le fit accéder au rang de Suprême du royaume de Haute-Valnia, Rénérald IV n’a connu de l’exercice du pouvoir qu’une lutte incessante contre l’ennemi féroce des Terres Astrales. Marié en toute hâte à la plantureuse Sataralia, la fille aînée du Roi Gorléan Ier (royaume de la Basse-Valnia), il aimerait maintenant officialiser l’union entre les peuples Valniens par la naissance d’un héritier commun aux deux patries.
Mais lorsqu’il découvre qu’il est parfaitement stérile, Rénérald se doit de prendre une décision contraire à ses principes: il fait appel à Nosrévald, son frère jumeau ténébreux pourtant banni hors du royaume. En lui échangeant un échantillon de sa semence contre une partie des terres, Rénérald espère le convaincre de sa cause. Mais Nosrévald a d’autres plans, il profite de l’invitation secrète que lui fait son frère pour lui lancer un sort irréversible: il lui inflige un gemme maléfique qui le fait disparaître en quelques minutes. Étrangement, sa main gauche résiste au poison. Et quelques instants plus tard, elle s’échappe en vue de préparer une vengeance terrible contre son frère ennemi…»

Tel est le scénario qui nous mène à l’exposition «Vers le sous-bois des aurores», proposée par Arnaud Dezoteux aux Bains-Douches. Pour cette occasion, il nous invite ainsi à découvrir son projet de film Behind the Scenes, commencé en janvier au Centre Pompidou et qui se poursuivra plus tard dans d’autres institutions.

En prenant comme cadre la réalisation d’un film d’Heroic Fantasy, l’enjeu du projet Behind the Scenes est de se saisir des possibilités qu’offre un tournage hollywoodien pour en faire le théâtre d’une forme de récit alternatif. En inversant la hiérarchie entre un film et le document de sa fabrication, il s’agit de prendre la fiction comme prétexte afin d’imaginer une aventure de coulisses, où les acteurs comme les techniciens négocient avec la virtualité des décors et la désillusion des trucages.

Pour son exposition aux Bains-Douches, Arnaud Dezoteux élabore ainsi le décor voué à accueillir l’une des scènes du récit d’Heroic Fantasy: où le roi ensorcelé s’échappe du royaume de Haute-Valnia, pour se retrouver exilé dans un sous-bois lointain. Geste étrange, le visiteur sera invité à déambuler dans le décor, la particularité de celui ci, étant sa complexité ainsi que sa charge d’éléments si l’on doit le comparer aux moyens de production hollywoodiens. Pendant la durée de l’exposition, Arnaud Dezoteux activera l’environnement en y réalisant plusieurs sessions de tournage.

En cela, il envisage le moment du tournage non pas comme une opération vouée à satisfaire la stricte exécution d’un scénario préétabli, mais plus comme un moment de négociation et de recherche avec l’acteur. Filmer sans coupure lui permet ainsi d’accéder à ce qui se cache derrière la composition d’un personnage, et à se laisser surprendre par les accidents inévitables qui se tissent entre le jeu et le non-jeu, la complicité du comédien ou son incompréhension, sa fragilité comme sa détermination.