Dominique Ghesquière s’attaque aux choses: des objets usuels, domestiques, quotidiens. Elle en expurge l’usage premier, fonctionnel, non pas pour leur conserver une unicité artistique mais pour leur attribuer uniquement un usage imagé. Pas imaginaire, imagé, c’est-à -dire construit d’après une image type. Les objets qu’elle fabrique ne sont pas simplement détournés, recyclés ou appropriés, selon les pratiques connues au XXe Siècle.
Ils sont travaillés de l’intérieur, décortiqués, «autopsiés» en quelque sorte, pour être ensuite recomposés. Il n’en reste, en vrai, que la peau, celle-ci devenue intangible, impalpable, car distancée par le regard du spectateur. C’est leur mise en scène, parfois très subtile, qui les rend à l’ordinaire.
L’oeil reconnaît mais l’esprit doute. Parce que souvent usés, abîmés ou en situation d’usage, ces objets épuisés offrent une configuration nouvelle où l’affect est matérialisé. Nous sommes alors emmenés vers un ailleurs, un espace psychique. Ce paysage reste cependant suffisamment ouvert et indéterminé pour ne pas conduire la pensée directement vers une direction prévisible.
A La BF15 un parquet et des rideaux sont soulevés, soufflés, bousculés, les verres des ampoules et les pampilles du lustre ont disparu, sans doute arrachés. La présence d’un escabeau pourrait suggérer un souci de retour à l’ordinaire, au fonctionnel. Pourtant, sa matière inattendue nous fait vite renoncer à cette idée. Les filaments du lustre persistant à rougeoyer, le mouvement éphémère du rideau pétrifié semblent témoigner d’une rébellion des objets.
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