Alain Bublex a toujours été séduit par la ville : sa concentration d’activité, la densité de son architecture sont les sujets de prédilection à partir desquels il travaille et propose des idées ludiques et loufoques, parfois provocantes.
En 1998, il suggérait ainsi d’investir de manière inédite l’espace urbain saturé en y implantant des UMH, Unités Mobiles d’Habitation, « volumes habitables légers aux structures métalliques et larges baies vitrées ». Ces Plug-In City sont en fait une idée originale de Peter Cook que Bublex a réalisée sous la forme de maquettes et de montages photographiques.
L’originalité de la démarche de Bublex réside justement en ces reprises de projets non construits (« Unbuilt ») auxquels il donne une visibilité par la production d’images fictives. C’est ce qu’il nous propose à nouveau en se penchant cette fois-ci sur le projet de Le Corbusier qui prévoyait, dans les années 1930, de réaliser le plan urbanistique pensé par l’industriel Gabriel Voisin. Cet ingénieur proposait de reconstruire intégralement le vieux centre historique de Paris, d’en dégager les axes de circulation en reconfigurant les espaces d’habitation sous la forme de tours de 50 mètres de hauteur, et en déplaçant l’activité commerciale à la périphérie.
Bublex réalise, en suivant les notes établies par Voisin, un plan de ce que serait aujourd’hui Paris si le projet avait vu le jour, ainsi que des vues de ce que seraient ces faubourgs commerciaux en combinant des photographies de grands axes périphériques à des dessins numériques par lesquels il greffe du possible sur le réel et montre à quoi auraient pu ressembler ces temples de la consommation recouverts de néons.
Un hommage est également fait à cet autre inventeur de formes qu’est Philippe Stark par un dessin épuré d’urbaniste reproduisant avec exactitude une rue située à Issy-les-Moulineaux. D’après Bublex, Stark aurait projeté de se l’approprier en la reconstruisant totalement. Mais ici, point d’intervention matérialisant le fantasme, la rue est représentée telle qu’on peut la voir actuellement. Bublex semble simplement vouloir pointer l’absence de plan d’ensemble qui la caractérise, l’état de chantier dans lequel elle est restée suspendue. Il y a des vides entre les habitations, un ciel immense, autant d’espaces béants attendant d’être remplis par quelque ingénieur audacieux.
En reprenant des projets qui n’ont pas eu de portée effective sur le réel, Bublex fait un peu comme Michelet qui prétendait redonner la voix à ceux que l’Histoire n’avait pas entendus. Par un recours aux possibilités virtuelles de l’image, il redonne vie à des projets que le cours trop sage du monde n’a pas retenus.
Alain Bublex
— Rue Starck, 2004. Encre sur papier. 73,5 x 516 cm.
— Le Plan voisin, 2004. Epreuve chromogène. 140 x 180 cm.
— V2 Circulaire Secteur 6, 2004. Epreuve chromogène sous diasec. 141,5 x 180 cm.
— Jonction des V1 N-S/E-O / le centre, la cité d’affaires, 2004. Epreuve chromogène sous diasec. 180 x 180 cm.
— V2 Circulaire secteur C23, 2004. Epreuve chromogène sous diasec. 165 x 180 cm.
— V2 Circulaire secteur C18, 2004. Epreuve chromogène sous diasec. 165 x 165 cm.
— Les Pieds devant (Véhicule), 2004. Technique mixte.
— Les Pieds devant (Voyager 2sm), 2004. Epreuve chromogène sous diasec 38 x 51 cm.
— Les Pieds devant (Tc Winiecki 1sm), 2004. Epreuve chromogène sous diasec. 38 x 51 cm.
— Les Pieds devant (Lawrence & Nelder), 2004. Epreuve chromogène sous diasec. 38 x 51 cm.
— Les Pieds devant (Bananafryer 2), 2004. Epreuve chromogène sous diasec. 38 x 51 cm.
— Les Pieds devant (Banana), 2004. Epreuve chromogène sous diasec. 38 x 51 cm..
— Les Pieds devant (Bruce), 2004. Epreuve chromogène sous diasec. 38,5 x 51 cm.
— Les Pieds devant (Rhinosm), 2004. Epreuve chromogène sous diasec. 38,5 x 49 cm. édition de 3
— Les Pieds devant (Vetter1sm), 2004. Epreuve chromogène sous diasec. 38 x 51 cm.
— Les Pieds devant (Ducact), 2004. Epreuve chromogène sous diasec. 38,5 x 51 cm.
— Le Centre de pression aéro-dynamique, 2004. Installation, technique mixte. Dimensions variables.