Axel Pahlavi
Un millier de baisers de profondeur
Soudain la nuit s’ouvre et se déploient des ruissellements de lumières phosphorées éclairant la figuration du corps humain. Et de nouveau, avec cette nouvelle série signée Axel Pahlavi, l’envergure. L’envergure du mystère de l’homme, être bipède dans l’univers. Elargissement des illuminations.
Axel Pahlavi a embrassé l’aube cosmique et l’a infusée dans sa peinture, retournée à sa source vibratoire, reversant au contemporain sa dette de rythmes et de flashs stroboscopés aux couleurs stabilo. L’entité humaine, dans son mystère, réintègre la réalité cosmique. Vient-elle de là , du fond de l’univers? Nul signe d’épigénèse ici: la figure, certes incomplète, se tient indiscutablement debout, seule formellement identifiable dans le tout nébuleux de la matière astrale (Signifié). Identifiable comme humaine. Alors, on comprend qu’Axel Pahlavi cherche, devine, débusque, ou expose plein phares (Doryphore) l’humanité dans l’individu.
Pour redécouvrir la personne humaine, Axel Pahlavi choisit la voie du strip-tease de l’espace intérieur. Pour saisir la part radicale d’altérité à jamais constituante de l’humanité (Altériternelle). Collage, montage, superposition. L’autre, qui n’est pas l’alter ego dans lequel on se reconnaît, rassuré et réconforté, et conforté, est au centre. Se voir comme un autre grâce à la peinture. On sort de ce qui se donne à la conscience comme intériorité, on fait tomber le for intérieur. Et le for intérieur redevient forum, intense moment d’exposition publique (Prise de vue).
L’enjeu, on le sent, est de réduire au maximum la distance, et pour cela de s’extérioriser au maximum, de ne pas laisser le confinement gagner (Lèvres). Faire exister au dehors l’intériorité. Laisser jouer l’obsession de l’altérité sans toujours déjà préjuger d’une personnification humaine sanctifiée, séparée de la matière du monde. C’est alors le moment d’une dissolution volontaire de la personne, pour laisser apparaître de l’individuel, de l’élémentaire humain.
Cette dissolution n’est donc pas une désintégration, car cette série de peintures debout (toutes mesurent 1m90) montre que la forme humaine résiste dans sa singularité, elle y est surgissante, elle s’impose dans le mouvement fluorescent de la matière sortie du fond primordial. Rien qui effraie dans ces espaces sidéraux. Le silence éternel de Pascal a laissé place à la couleur interstellaire, qui bruit de pensée lumineuse fluide, non coagulée, vivante.
Aurore boréale sur l’espace retrouvé de la peinture qui ouvre, parce qu’elle cherche là (Génération) et trouve ici (Ton cœur) le non-endroit de la relation humaine qui s’instaure fondamentalement par la reconnaissance mutuelle, interindividuelle, d’une forme humaine commune. Une forme humaine qui englobe la prime enfance. Qui comprend le petit d’homme dont le père est aussi bien la mère (Douceur ce matin).
Le père porte un nez de clown? C’est le jeu du strip-tease public de l’espace intérieur. La Personne est déplacée par la rencontre. La Forme est délogée de sa fixité. La figure est déphasée par la couleur. La vision est diffractée par l’expérience sensible de l’étalement de l’espace.
Le choc des couleurs, qui met en mouvement une imagerie cosmique, déjoue la pesanteur et dévoile ici un lien profond entre la foi fervente et l’amour de l’univers, retrouvant la possibilité d’un espace de contemplation picturale, travaillé par la conscience de l’endurance (Dès l’aube) et la gratitude due à l’esprit (Sans titre 2).