Communiqué de presse
Stéphane Kropf, Clotilde Lataille
Tsarskaya
« Il y a une grande difficulté à parler de peinture aujourd’hui, parce qu’il y a aussi une grande difficulté à la voir. Parce que c’est une peinture —en particulier sans doute la nouvelle abstraction géométrique— qui ne veut plus être regardée et qui ne vous regarde plus. » (Jean Baudrillard)
C’est sur cette difficulté à voir que Tsarkaya se positionne, avec l’arrogance de la jeunesse, par un jeu de questions sans réponses que nous proposent Stéphane Kropf et Clotilde Lataille. Une certaine souveraineté de la peinture, imposée comme une évidence, revendiquée par un héritage (suisse) commun.
« La peinture réduite à elle-même: des couleurs sur une surface (…). Silencieusement. Le matériau porté à l’incandescence. » Ces quelques lignes consacrées à Rothko par Youssef Ishagpour pourraient parfaitement se faire l’écho du travail récent de Stéphane Kropf, de ses recherches sur la lumière intrinsèque à la couleur.
Si l’on connaît peut-être mieux ses reproductions de tickets de caisse, de billets de transport en commun, de QR codes et d’hologrammes permettant l’authentification, le fichage et le scan, le contrôle omniprésent et l’obsession de l’identification, il pratique aujourd’hui une sorte d’abstraction du monochrome.
Expliquons nous: le monochrome tend à matérialiser la peinture en un objet tant phénoménologique que mystique, c’est selon. Kropf tente de le dématérialiser, il en joue comme d’un rayon de soleil pris dans un miroir. Usant de peinture acrylique interférente, qui a la propriété de réfléchir deux couleurs différentes selon l’angle de vue, ses toiles deviennent de faux monochromes, oscillant entre blanc et couleur, couleur apposée et couleur reflétée.
Par-delà les clins d’oeil qui foisonnent dans son travail (Armleder, Pollock, Walker…) résonne déjà , chez Clotilde Lataille, un intérêt très personnel pour la peinture matière, coulante, collante, dégoulinante, expression plastique au sens le plus pur, dans un noir dominant paradoxalement utilisé pour qu’on l’oublie justement un peu au profit de tout le reste.
Le noir comme une base d’où l’on peut aborder toutes les questions picturales (texture, application, brouillage de l’image ou représentation…) dans une couleur qui n’en est pas une, située hors du spectre de lumière visible. Un noir exclu de notre vision standardisée en RVB, un noir qui affirme que les choses sont ce qu’elles sont face à un nacré qui tend à les déstabiliser.