Davis Rhodes, Dan Shaw-Town, Ned Vena
Trojan Horses
Contredisant ce que l’artiste et critique Thomas Lawson avançait il y a trente ans dans son Manifeste Last Exit: Painting (1981): «les artistes radicaux sont actuellement face à un choix: le désespoir ou l’ultime sortie: la peinture», suggérant la peinture pure comme le parfait camouflage «permettant de placer l’activité esthétique critique au centre du marché de l’art, où elle peut semer le plus grand trouble».
Une nouvelle génération d’artistes radicaux semble embrasser une nouvelle approche non conventionnelle du médium de la peinture, bien au-delà de la peinture elle-même. Une sorte de camouflage habile du camouflage; les surfaces bidimensionnelles, souvent caractérisées par un espacement intense, sont le champ d’un dialogue puissant entre surface et volume, platitude et forme. Le champ plan de la toile acquiert une physicalité puissante qui se rapproche de la tridimensionnalité et même du mouvement cinématique. En fonctionnant comme une sorte de Cheval de Troie, de nouvelles formes hybrides — ni dessin ni sculpture, ni toile, ni film — livrent avant tout une subversion et une critique précisément là où la peinture n’avait jamais été remise en question, une conséquence de la nouvelle ère de la peinture au sein de laquelle une nouvelle génération d’artistes va au-delà de l’abstraction picturale, en détournant les moyens picturaux conventionnels.
Davis Rhodes
Né en 1983 au Canada. Vit et travaille à Brooklyn, New York.
Davis Rhodes combine le «color field» et la peinture «hard-edge» avec des positions post-minimales dans le but d’explorer des relations intimes entre la pratique de l’atelier et la performance publique. Il prend le concept de l’objet peint comme point de départ en posant les questions liées à l’acte de peindre et aux valeurs culturelles associées à la peinture, à la surface et aux stratégies d’exposition. La plupart des images utilisées dont s’inspire Davis Rhodes se trouvent sur les pancartes et les posters que l’on voit dans la rue ou le métro, une imagerie commerciale directe faite pour être lue en un instant. Davis Rhodes utilise des matériaux jetables qu’il remanie et traite comme des accessoires qui sont ensuite joués de différentes manières selon leur environnement: atelier, extérieur, espace d’exposition.
Dan Shaw-Town
Né en 1983 au Royaume-Uni. Vit et travaille à Brooklyn, New York.
Les Å“uvres de Dan Shaw-Town donnent une impression de fini lisse et élégant, en totale contradiction avec l’utilisation de matériaux complexes, et la nature fonctionnelle du processus de ses installations. Utilisant la technique traditionnelle du graphite sur papier, il plie, froisse, écrase et retravaille ses dessins pour qu’ils deviennent à la fois élégants et usés, et puissent ainsi dévoiler leur potentiel caché. La précision de ses travaux ne devient apparente qu’en se rapprochant. Les dessins sont effacés, poncés, peints, afin d’obtenir une multitude de surfaces et de textures, peu à l’aise sur le papier. Ses Å“uvres brouillent la distinction entre dessin et sculpture, se présentent parfois comme des objets pliés et placés sur le sol, dissimulant la surface la plus travaillée à l’intérieur.
Ned Vena
Né en 1982 à Boston. Vit et travaille à Brooklyn, New York.
Les peintures de Ned Vena combinent les lectures assidues de l’artiste sur le minimalisme, l’après-abstraction et l’op-art, avec des techniques uniques qui rendent austères les méditations sur la matérialité. Ned Vena utilise des matières dont l’usage initialement prévu est d’ordre commercial ou industriel. Cela va de peintures vernies de protection à du caoutchouc en spray, en passant par une encre violet profond utilisée dans les pistolets à étiquettes des magasins, de l’acide jeté sur des miroirs, des peintures fabriquées par la marque Rust-Oleum, spécialisée dans les apprêts anti-rouille pour métal. Le choix de ces matériaux non traditionnels souligne le fort intérêt de l’artiste pour la forme et le processus de création dans l’élaboration de ses concepts.