La galerie In Situ présente des pièces de Bruno Perramant, Mark Dion, Andrea Blum, Damien Deroubaix, Patrick van Caeckenbergh et Laurent Tixador, ayant pour point commun les animaux et la nature (humaine). Derrière un titre peu engageant, Tristes Utopies, est une exposition intéressante avec de belles pièces.
Peu d’animaux sauvages rodent dans la capitale, mais Mark Dion, à occasion de l’exposition, aurait pu faire une étude de la faune et la flore germanopratine, comme il a déjà pu le faire à New York avec The Report of the Department of Marine Animal Inventory of the City of New York China Town Division (1992), ou Urban Wildlife Observation Unit (2002), deux pièces parmi tant d’autres qui montrent bien l’humour dont sait faire preuve l’artiste.
Avec Tristes utopies, on peut voir notamment Library for the Birds of Massachusetts (2005) et Iceberg and Palm Trees (2007) — stars de l’exposition —, œuvres fortes mais déjà vues de nombreuses fois et davantage à leur place dans les musées.
Mark Dion aime jouer avec ces derniers ainsi qu’avec l’idée de collection. Sur son travail avec les musées d’histoire naturelle se dessine la question «Comment sait-on ce que l’on sait?»; interrogation que soulève Library for the Birds of Massachusetts (bibliothèque d’acier tubulaire contenant des livres mais aussi des petits oiseaux vivants) placée au cœur de l’espace d’exposition, tout en posant des problèmes éthiques.
Cette exposition est l’occasion de réaffirmer que le travail et la position de Mark Dion ne sont pas écologiques et qu’il n’est pas militant, mais que Mark Dion est un artiste utilisant des méthodes et techniques scientifiques en tant qu’artiste, et portant un regard décalé sur notre monde et sa nature profonde ou non.
La galerie In Situ offre également la possibilité de découvrir une autre pièce utilisant un animal vivant : In Bed With a Cold Blooded Animal (2008) d’Andrea Blum. La pièce est tout à fait saisissante, et le choix de l’espace dans lequel elle est montrée est parfait — le show room, espace de dimensions réduites. En entrant dans la pièce, on est confronté au regard étrange de l’animal (un lézard) installé à coté d’un lit de repos. L’on peut s’y allonger et y passer un moment. Montrée en mars 2009 à Paris, cette pièce gagne en couches de significations et donne réellement envie de s’arrêter un temps pour réfléchir à nos tristes utopies et du même coup, à celui qui leur donne vie, l’Homme et sa complexité fascinante.
Dans la salle d’exposition principale, l’œuvre de Bruno Perramant diffuse sa force discrète. Les couleurs du diptyque exercent un magnétisme déroutant combiné au vide laissé entre les deux toiles, entre les deux oiseaux blancs. Face à Parenthèse (2007), on perçoit à nouveau l’intelligence plastique et la finesse du peintre. Sans paillettes, cris, ni grands moyens, Bruno Perramant touche au plus près nos sentiments tout en activant notre réflexion.
«Quand l’humanité des animaux fait réfléchir à l’animalité des hommes»: l’ambition annoncée de la part de la galerie (quoique passionnante) n’est ni risquée ni originale — mais pourquoi cette exposition devrait-elle l’être ?
Cessons de demander aux galeries des prises de position permanente, de la pédagogie et tant d’autres choses. Une galerie vend des œuvres. Avec Tristes Utopies, la galerie In Situ propose une belle exposition, riche et bien pensée. Elle prouve qu’on peut vendre (ou essayer) joliment : c’est déjà beaucoup.
Marc Dion
— Polar Bear (Ursus Maritimus), 1992-2002. Photo noir et blanc. 42,5 x 49 cm x 22
— Library for the birds of massachusetts, 2005. Acier, arbre, contre-plaqué, livres, oiseaux, matériaux divers. 400 x 240 cm
— Iceberg and Palm Trees, 2007. Ours en peluche, boite en aluminium, plante en tissu dans un seau en aluminium, goudron, tendeurs, caisse de transport. 330 x 100 x 150 cm
— Hunting Standard (Stag), 2005. Papiers de couleurs collés sur papier. 50,1 x 38 cm
— Hunting Standard (Boar), 2005. Papiers de couleurs collés sur papier. 30 x 45 cm
— Table of confectionery curiousities, 2008 (en collaboration avec Dana Sherwood). Crayon et aquarelle sur papier. 32,5 x 25 cm
— The Mobile Gull Appreciation Unit, 2006. Crayon rouge et bleu sur papier. 22,9 x 30,4 cm
Damien Deroubaix
— Fresh-Fruit-For-Rotting-Vegetables, 2008. Aquarelle, encre et acrylique sur papier. 268 x 347 cm
— Mako + Yeah, 2004. Pyrogravure manuelle sur contreplaqué. 86 x 116 cm
— Mass appeal Madness Eats Your Brain, 2004. Pyrogravure manuelle et laser sur contreplaqué. 29 x 42 cm
— Welcome to the jungle, 2005. Encre. 150 x 200 cm
— Sans titre, 2007. Pyrogravure manuelle et laser sur contreplaqué. 29 x 42 cm
— Löwe, 2007. Pyrogravure manuelle et laser sur contreplaqué. 29 x 42 cm
— Messiah, 2007. Pyrogravure manuelle et laser sur contreplaqué. 29 x 42 cm
Patrick van Caeckenbergh
— Le Saisonnier, 2001. Collage photographique, encadré. 168 x 100 cm
— Comparaison infinie, 3e version, 1994. Collage sur papier. 135 x 135 cm
— Coiffe Tricoter, 2008. Bonnet d’âne en laine, plâtre, plastique, pied en métal, paille, petit livre (collage sur carton), pied en bois. Bonnet : 64 x 22 x 18 cm ; Petit livre : 28,5 x 17 cm
Bruno Perramant
— Parenthèse, 2007. Huile sur toile. 2 x (80 x 100 cm)
Andrea Blum
— In bed with a Cold Blooded Animal, 2008. Structure en acier perforé, vitrine, lampes, branche, coussin, lézard. 114 x 236 x 140 cm
— Tree Aviary, 2007. C-print sur papier. 53,5 x 75,5 cm
— Aviary, 2009. C-print sur papier. 55,5 x 79,5 cm
Laurent Tixador
— Killingusaap avataani, bois de renne sculpté, 2008. Ivoire de narval, bois de renne. 70 x 30 cm