ÉCHOS
01 Jan 2002

Trisha Brown à Paris : un parcours à travers l’histoire de la danse

Á Paris, en juillet, le geste brownien se déploie au fil de l’eau, se répète inlassablement entre les sculptures et les tableaux du Centre Pompidou, trouve un nouvel élan dans le parc du domaine de Chamarande ou les jardins du Palais Royal… Ainsi, en silence ou sur fond de grande musique, les pièces de Trisha Brown portent l’empreinte de l’histoire et nous invitent à redécouvrir d’un œil nouveau le corps et notre environnement urbain. 

Par Céline Piettre

Les apparitions de la Trisha Brown Compagny se font rares dans la capitale française. Ce mois de juillet 2008 aura donc un parfum d’exception puisque nous aurons le privilège de retrouver, dans le cadre du festival Paris-Quartier d’été, quelques unes des pièces historiques de la chorégraphes américaine — celles créées au début des années 1970 : les Early Works — et des œuvres plus récentes comme Foray Forêt ou Present Tense composée d’après des sonates et des interludes de John Cage.

Acquise aux préceptes de la danse post-moderne aux côtés d’Anna Halprin et de Robert Dunn, la jeune chorégraphe américaine participe dès 1962 aux activités de l’avant-gardiste Judson Dance Theatre pour une remise en question des principes chorégraphiques et des frontières disciplinaires. Sous son impulsion — et celle de Steve Paxton, Merce Cunningham ou Yvonne Rainer — le corps devient un territoire de liberté et de renouveau esthétique, politique et social. Hors normes, hors cadres, Trisha Brown abandonne volontairement la frontalité du théâtre pour investir les lieux publics (musées, rues, toits) et intègre à ses chorégraphies les gestes du quotidien : marcher, s’habiller, prendre, lâcher, dormir…

Fidèles au dogme brownien, les pièces reprises à Paris cet été ont le mérite de respecter les contextes de production originels et la prédilection de la chorégraphe pour les musées et les jardins new-yorkais. Ainsi, Sticks (1973), Spanish Dance (1973), Floor on the Forest (1974), ou la série des Accumulation(s) (1971-1973), construites à partir de l’addition progressive de gestes isolés, sont présentées au sein des collections du Centre Pompidou, et plus tard sous les arbres du domaine de Chamarande. Jouées plusieurs fois dans le même après-midi à différents endroits du musée ou du parc, ces petites formes de quinze minutes tout au plus explorent un nouveau rapport au temps et à l’espace et bouleversent notre perception en multipliant les angles de vue.
Quant aux promeneurs du dimanche, ils auront la chance de voir les danseurs de la compagnie exécuter la rengaine du célèbre Group Primary Accumulation depuis les bassins des Tuileries, en hommage à l’une des premières représentations publiques de la pièce, en 1974, où quatre radeaux avaient été disposés sur les flots du Loring Lagoon à Minneapolis.

Un regret subsiste, néanmoins. De cette période fondatrice dans l’œuvre de Trisha Brown, on aurait aimé voir transposer dans notre contexte parisien les périlleuses pièces antigravitationnelles, Planes (1968) et Man Walking Down the Side of a Building (1970), où l’interprète, harnaché comme un alpiniste, défiait le vide par une marche vertigineuse le long d’une paroi d’immeuble, mettant en cause les fondamentaux du mouvement : poids, verticalité, vitesse.

Mais, heureusement pour nous, la présentation dans les jardins du Palais-Royal de trois de ses pièces les plus récentes compense ces lacunes, d’autant que l’on retrouve ici l’attrait de la chorégraphe pour l’abstraction du geste tout en découvrant une nouvelle facette de son travail.  Musicales, chargées d’un dynamisme physique et émotionnel, ses dernières oeuvres témoignent d’un certain intérêt pour la narration qui transforme les duos de Present Tense (2003) en une véritable aventure aérienne.

Programme
— 16-17 juillet / 12h-18h / Centre Pompidou / Floor on the Forest (1969-1971), Accumulation (1971), Sticks (1973), Figure Eigth (1974), Spanish Dance (1973), Group Primary Accumulation (1973)
— 20 juillet / 15h30 et 17h30 / Domaine de Chamarande (Essone) / Floor on the Forest (1969-1971), Accumulation (1971), Sticks (1973), Figure Eigth (1974), Spanish Dance (1973), Group Primary Accumulation (1973)
— 21 juillet / 13h30 / Ecole des beaux-arts de Paris / Conférence et rencontre avec Trisha Brown
— 23-26 juillet / 22h / Palais-Royal / Foray Forêt (1990), Canto-Pianto (1998), Present Tense (2003)
— 28 juillet / 13h et 19h / Jardin des Tuileries / Group Primary Accumulation (1973)

Lien
www.quartierdete.com

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