L’encre qu’utilise Clément Bagot dans ses dessins, s’écoule par tracés convoitant le papier vide. La surface du papier semble alors prise d’assaut, envahie de lignes, de traits, de segments, parfois de micro-motifs. A l’issue de ce circuit foisonnant que l’encre constitue, des densités s’imposent, des cavités se creusent, des alvéoles à géométrie variable s’agencent et le fond, agité de sinuosités, existe enfin.
Par leur apparente absence d’harmonie et leur complexité graphique, on peut se demander, au premier regard, s’il s‘agit de cellules biologiques considérablement agrandies ou de cartes topographiques sensiblement atrophiées. Puis à mesure que l’on contemple la precision et l’unicité de chaque trait, de chaque dessin, on est tenté de faire le rapprochement avec les empreintes digitales, et à leur singularité inalterable. Mais qu’y a-t-il d’aussi puissant, unique et graphique qu’une cellule génétique ou une empreinte digitale, si ce n’est l’écriture intérieure qui anime (plus ou moins) chaque être?
Il s’agit presque d’une écriture qui semble intimement liée à l’état dans lequel était l’artiste au moment de créer: une écriture à la syntaxe secrete et versatile, dont la cadence et l’intensité ne cessent d’onduler. Tantôt courbes langoureuses qui ont l’air de vouloir prendre leur temps, tantôt traits plus nerveux, presque saccadés, paraissant en proie à une crise de manque de temps, d’accélération subite. Le temps est créateur. Il ne faut donc pas l’abolir, travailler à l’annuler, essayer de l’ignorer. Clément Bagot s’y engouffre et dessine l’infinie perspective des chemins aux sentiers qui bifurquent. Et ce faisant, nous embarque avec lui, pour des voyages exploratoires de l’infini.
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