Arthur Tress
Transréalités
«La photographie est ma méthode pour délimiter le monde confus qui se précipite constamment sur moi. C’est mon attitude défensive pour réduire le chaos quotidien dans des images compréhensibles. A travers l’appareil j’essaie de clarifier et d’éditer l’innombrable flot de moments qui paradent et envahissent mes sens constamment. Mon urgence à photographier est activée par un instinct quasi biologique d’auto-préservation du désordre. L’appareil photographique est un dispositif mécanique qui prolonge naturellement ma capacité et mon désir d’organisation sensée. J’en ai besoin pour survivre.» Arthur Tress
Depuis 1974 et la présentation remarquée de sa série «Le collectionneur de rêves» aux Rencontres d’Arles par Alain Tournier, l’œuvre d’Arthur Tress s’est imposée dans le monde entier à travers de nombreux livres et expositions. Avec Diane Arbus, Lee Fredlander, Duane Michals, Leslie Krims et Ralph Gibson, il fit partie de la génération de ces photographes américains qui dans les années 70 balayèrent les stéréotypes. Ils mirent leur talent au service d’une esthétique inventive et subversive dont on peut encore aujourd’hui mesurer l’emprise sur la conception post-moderne de la photographie.
Contrairement aux autres photographes de sa génération qui renouvelèrent une seule approche de la photographie, Arthur Tress lui, a fait voler en éclats les genres classiques. En introduisant une bonne part de fiction dans ce qui normalement ne devait être qu’un point de vue documentaire il a opéré une subversion dans le reportage. Cette exposition et le livre qui l’accompagne mettent en tension différents ensembles de cet auteur à l’énergie créatrice rare.
Regroupant une sélection de ses meilleures photographies depuis celles qu’il prit dans les années cinquante dans les rues de New York et de Brooklyn jusqu’aux images oniriques et fantasmées qui le rendirent célèbre, ce projet met en lumière une œuvre à la richesse encore peu connue en Europe. L’exposition compte notamment quelques unes de ses images de reportage réalisées à San Francisco durant l’été 64, perles d’insolite et d’humour, qui n’ont jusqu’ici jamais été exposées.
C’est dans les années soixante qu’Arthur Tress s’engage petit à petit, se fait défenseur d’une certaine idée de l’Amérique où les particularismes ne doivent rien céder; il se fait aussi défenseur de la cause homosexuelle et des droits civiques. Le choix des images insiste pour la première fois sur l’influence cinématographique et plus particulièrement néoréaliste des débuts de l’auteur ainsi que sur sa vision radicale rompant avec la «street photographie» conventionnelle de l’époque.
«Mon lycée se trouvait dans le quartier de Brighton Beach et de Coney Island et, bien que la photographie n’y soit pas enseignée, il avait une très bonne section artistique. Ma sœur m’avait offert un Rolleiflex et, à la morte-saison, je traînais après les cours dans les parcs d’attractions abandonnés et les manèges désaffectés, produisant des images très introverties et mélancoliques qui reflétaient peut-être ce que je ressentais en tant qu’adolescent à l’homosexualité naissante qui n’avait pas beaucoup d’amis.» Arthur Tress
Biographie Né à Brooklyn en 1940, Arthur Tress a grandi à New York. Influencé par Henri Cartier-Bresson, il s’intéresse à la sociologie et l’ethnographie, intérêt qui se manifeste dans ses œuvres au cours de ses voyages au Mexique, en Afrique, en Asie ou dans les skate-parks de Californie.
Catalogue
Claude Nori, Arthur Tress – Transréalités, 2013. Ed. Contrejour-Château d’Eau