Pauline Boudry et Renate Lorenz
To Valerie Solanas and Marilyn Monroe in recognition of their desperation
Pauline Boudry et Renate Lorenz s’attachent à révéler les discours et aprioris relatifs aux identités sexuelles à travers l’histoire. En se positionnant autour de la question du queer, les artistes abordent la construction individuelle et sociale pour ce qu’elle peut comporter de transgression et de détachement vis-à -vis de la norme. Surtout, ces axes de réflexion qui se portent généralement à l’aune des sciences sociales sont ici interrogés dans un cadre plastique, à partir de l’installation, la performance et la vidéo plus précisément.
Avec le projet To Valerie Solanas and Marilyn Monroe in Recognition of their Desperation, dont le titre reprend une composition musicale de Pauline Oliveros datant de 1971, l’installation vidéo présente six individus (cinq femmes et un travesti) interprétant le morceau d’Oliveros. La chanson fut écrite en 1970 après la lecture du pamphlet Scum Manifesto rédigé par Valerie Solanas, intellectuelle féministe qui a sombré dans la folie et la prostitution, aussi connue pour avoir tenté d’assassiner Andy Warhol. La figure de Marilyn Monroe, dont on connaît la fin tragique, est également perçue comme un point d’inspiration.
La partition d’Oliveros suggère aux intervenant de choisir entre cinq dispositions et de les jouer sur des tonalités particulières, qu’il s’agit de moduler en improvisant. Arrivés à un certain point, ces mêmes intervenants sont invités à s’imiter mutuellement. L’objectif initial consiste à atteindre une forme d’équilibre à la fois musical et collectif. En effet, en fonctionnant sur ce principe et en s’articulant avec les propos de Solanas aussi bien qu’avec le titre d’Oliveros, les protagonistes enclenchent un dispositif d’interaction de groupe qui s’appuie sur les rapports de dominance et d’adaptation, de sorte que le « pouvoir » puisse circuler entre ceux qui ont la parole et ceux qui l’écoutent.
La performance est filmée en une seule prise, un travail de postproduction y inclut des gros plans, ce qui permet de souligner le rapport fétichiste que certaines parties du corps, instruments ou costumes peuvent exercer. Ce travail de Pauline Boudry et Renate Lorenz soulève la question des frontières politiques que revêtent certaines formes musicales ou filmées. Dans cette optique, il s’agit de se demander si des sons, des rythmes et des jeux de lumière sont en mesure d’initier des relations que l’on pourrait qualifier de «queer», tout comme il est question d’envisager leur probable consistance révolutionnaire.