Ezra Wube
This and that
Le travail d’Ezra Wube entremêle éléments biographiques et culture populaire pour évoquer les notions de passé et de présent, la mobilité permanente et la tension dialogique qui sépare «ici» et «là ». En utilisant à la fois des outils numériques et des matériaux plus artisanaux, l’animation en image par image fond les décors et les personnages dans un flux de formes et de couleurs. L’apparente naïveté de ces saynètes met en lumière la beauté et les faiblesses d’hommes tiraillés entre tradition et modernité.
Bridge St est une peinture animée élaborée sur deux toiles séparées. Pour cette courte vidéo où chaque scène naît d’une rencontre avec un passant, Ezra Wube aborde des inconnus dans New-York et leur demande de le conduire à leur lieu favori du quartier. Après avoir fait un croquis de ce lieu, il demande à un autre passant de le conduire à son lieu favori et ainsi de suite. Il peint ensuite ces scènes sur deux toiles séparées, en s’appuyant sur ses croquis et ses souvenirs. Chaque plan de la vidéo est peint au-dessus du précédent.
Hisab est une peinture animée réalisée en n’utilisant qu’une seule toile. Ezra Wube y reprend un conte populaire éthiopien et se l’approprie en y incorporant des éléments de sa propre biographie: les lieux où il a grandi constituent les décors, et les voix des protagonistes sont celles d’habitants du quartier, d’amis ou de membres de la famille de l’artiste. Après avoir peint une scène, Ezra Wube en photographie le résultat. Chaque plan est peint au-dessus du précédent, de telle sorte que chaque image semble donner naissance à la suivante. En combinant ainsi des médiums traditionnels et modernes (peinture et vidéo numérique), l’artiste s’autorise à conserver le passé tout en avançant vers l’avenir.
L’histoire de Wenzu est tirée d’une autre légende, que Tafesech Zeleke, la grand-mère de l’artiste, qui l’a élevé, avait l’habitude de raconter dans sa cuisine. Après un voyage de plusieurs mois en Ethiopie, Ezra Wube est retourné dans la maison où il a grandi à Addis-Abeba pour réentendre cette histoire. A la suite du décès de sa grand-mère, il décide de s’inspirer de ce conte populaire pour réaliser Wenzu.
Pour cette vidéo animée en stop motion, le vidéaste a fabriqué une serre et y a cultivé des haricots. Puis, sur une vitre suspendue au-dessus de la serre, il utilise du sel, de la terre, des graines, des légumes, du teff et des lentilles pour donner vie à cette histoire pendant que les haricots poussent à l’arrière-plan. Chaque plan est enregistré par une caméra fixée au-dessus de la vitre et connectée à un ordinateur. Ce processus, comme l’histoire qu’il raconte, s’ancre dans l’expérience et n’a d’existence qu’éphémère, commémorative et séculière.