Les physiciens quantiques sont aujourd’hui de plus en plus convaincus qu’il existe une multiplicité de mondes parallèles. Dans l’hexalogie A la croisée des mondes, série de romans de genre fantasy, l’écrivain britannique Philip Pullman accorde une grande importance à la théorie des univers parallèles développée dans les années 50 par le physicien et mathématicien américain Hugh Everett: «Car ce monde, comme tous les autres univers, est né du résultat des probabilités. Prenons l’exemple du jeu de pile ou face: la pièce que tu lances peut retomber sur pile ou sur face, mais on ne sait pas à l’avance de quel côté elle va tomber. Si c’est sur face, ça veut dire que la possibilité qu’elle tombe sur pile a échoué. Mais juste avant qu’on la lance, les deux probabilités ont la même chance. Si, dans un autre monde, la pièce tombe sur pile à ce moment-là , les deux mondes se séparent. J’utilise l’exemple de pile ou face pour que ce soit plus clair. En réalité, ces échecs de probabilités se produisent au niveau des particules élémentaires».
L’Å“uvre complexe de Gilles Barbier, dessinateur et sculpteur, s’articule autour des principes du doute, de l’ambivalence et des sens multiples. Plastique et prolifique, son Å“uvre ne cesse, depuis une quinzaine d’années, d’interroger les postulats de la connaissance et de la représentation au sein d’un véritable projet de déconstruction et de reconstruction.
Explorant les cheminements de la pensée, les chevauchements d’idées et les interactions, son travail s’inscrit dans le réel et se nourrit de disciplines aussi diverses que l’esthétique, l’histoire, les arts plastiques, la psychanalyse, la philosophie, les sciences et la bande dessinée.
Pour Gilles Barbier, il y aurait ainsi un monde en forme de tongue, un autre en forme de motte, ou en troisième en forme de trou du cul, autant de possibilités cosmiques logiques et combinatoires que l’artiste présente à la Galerie Georges-Philippe & Nathalie Vallois.
Les différentes formes de monde accompagnent depuis toujours l’histoire des hommes. Plat, créé par Dieu ou par les dieux, résultant du Big Bang, magique ou scientifiquement logique, ces mondes se construisent sur un schéma toujours identique: un postulat de départ d’où sont tirés les axiomes qui en définissent les règles.
Tout cela repose sur un sens cohérent si ce n’est que le postulat qui en constitue l’origine n’est toujours que pure hypothèse. Cette idée, essentielle pour Gilles Barbier, implique que tous les postulats se valent et qu’aucun ne peut prétendre à une quelconque vérité.
Décliner ces univers selon des principes logiques de fonctionnement et d’articulation est le jeu auquel se livre Gilles Barbier. Faisant appel aux motifs récurrents de son œuvre, comme les soupes, les trous, la terre, les clones ou le langage, et les érigeant en postulats à l’origine de ses mondes, l’artiste invente le «Monde en forme de motte» peuplé de vers de terre, le «Monde comme une maison sur un arbre», le «Monde trou du cul» déployant ses constructions de bidonville, et dont le titre, à l’arrivée, ne contient malheureusement presque plus de charge humoristique, ou encore le «Monde en forme d’histoires tissées» qui exploite la dimension rhizomatique du langage.
Chacun de ces mondes trouve sa place au sein d’une structure générique définie par l’artiste comme «La Mousse». Rendus ainsi à leur fragilité, à leur caractère éphémère mais aussi expansif et combinatoire, les mondes que Gilles Barbier nous présente sous la forme de grandes sculptures et de dessins n’en constituent pas moins une métaphore de sa propre pratique artistique: une série d’articulations à l’intérieur de son œuvre proliférante et tentaculaire.
Gilles Barbier, In the soup, a cheddar fondue and three nightmares, speach, bubbles (tenant & owner), isolated segments (the infinite assassin) and bananas, 2010. Technique mixte. 180 x 100 x 95 cm
Gilles Barbier, The Blender, 2010. Technique mixte sur polyester. 210 x 210 cm.
Gilles Barbier, In the Soup (lorum ipsum), 2010. Technique mixte sur papier. 210 x 210 cm.
Gilles Barbier, In the Soup (les gilles), 2010. Technique mixte sur papier. 210 x 210 cm.
Gilles Barbier, In the Soup (Melted cheese), 2010. Technique mixte sur papier. 210 x 210 cm.
Gilles Barbier, Le Monde motte de terre, 2010. Technique mixte. 270 x 130 x 130 cm.
Gilles Barbier, Le Monde comme une maison sur un arbre, 2010. Technique mixte. 250 x 165 x 130 cm.
Gilles Barbier, Le Monde trou du cul, 2010. Technique mixte. 94 x 200 x 163 cm.
Gilles Barbier, Le Monde en forme de tong, 2010. Technique mixte. 137 x 85 x 185 cm.
Gilles Barbier, Le Monde en forme d’histoires tissées, 2010. Technique mixte. 160 x 160 x 160 cm.
Gilles Barbier, La Matière noire, 2010. Perspex extrudé. 200 x 200 x 45 cm.
Gilles Barbier, Le Monde en forme de tong, 2010. Acrylique et blanco sur calque. 140 x 186 cm.
Gilles Barbier, Le Fond, 2010. Acrylique et blanco sur calque. 140 x 186 cm.
Gilles Barbier, Le Monde en forme d’histoires tissées, 2010. Acrylique et blanco sur calque. 140 x 186 cm.
Gilles Barbier, Le Monde motte de terre, 2010. Acrylique et blanco sur calque. 140 x 122 cm.
Gilles Barbier, Le Monde mousse, 2010. Acrylique sur papier. 140 x 250 cm.
Gilles Barbier, La Tong, 2010. Technique mixte, 9 x 26 x 12 cm.
Gilles Barbier, The Peanut World, 2010. Résine, perspex, peinture. 36 x 36 x 21 cm.
Gilles Barbier, Le Coconutarium, 2010. Technique mixte. 40 x 70 x 70 cm.