Cat Fenwick, Chloé Jarry
The Pretend Is Near
Un dallage aux formes géométriques, élément tout à la fois familier et peu coutumier comme promotion d’une manifestation d’art contemporain: le visuel de «The Pretend Is Near» annonce l’exposition et le positionnement des artistes. Il place immédiatement le spectateur comme regardeur attentif de ce qui est proposé à voir: une œuvre d’art séduisante par sa matérialité qui s’inspire de la trivialité de notre quotidien.
Chloé Jarry et Cat Fenwick interrogent les valeurs d’éléments manufacturés de notre société par un travail sculptural, elles réalisent ainsi une mise en marge aigüe et subtile de nos environnements. Les artistes s’inspirent à la fois de constructions coercitives de notre espace public et d’objets sériels, produits en masse et appréhendés par leur aspect utilitaire – prises de courant, poignées de porte, néons.
La matière est centrale, sans cesse prélevée, déplacée, découpée, reformulée. Elle produit un écart avec la réalité initiale. Ce ne sont pas des accumulations d’objets pré-existants mais la création de nouvelles formes. Une place est donnée à l’incident, à l’imprévu, à la singularité. Les rétractations ou torsions inhérentes au travail de la céramique – pratiquée par Cat Fenwick et Chloé Jarry – sont assumées. Des matériaux bruts sont prélevés, modifiés, des changements d’échelles s’opèrent.
Leurs œuvres comportent une relative fragilité qui accroît la part sensitive, l’envie de toucher à notre tour ces vases comprimés par le bois (Between two stools de Cat Fenwick), tout en rendant inopérant leur utilité apparente, à l’image des Tapettes de tapis en céramique de Chloé Jarry. Toutes deux refusent le sensationnel, préférant le sensible.
Ces sculptures revendiquent leur statut d’œuvres a-fonctionnelles: le carrelage d’aquarelles de Chloé Jarry ne peut être foulé (Ciment Songe). Un décalage réalisé avec malice. Leur hors-champ se fait présent. Par la confrontation de notre regard avec ces œuvres, nous reconsidérons notre rapport aux objets extérieurs. Cat Fenwick et Chloé Jarry élaborent une critique de notre société, avec une part de fascination pour celle-ci. Et avec humilité: elles suggèrent une attention renouvelée à notre environnement.