Cyprien Gaillard
The Player – Cities of gold and Mirror
Souvent décrit comme un vandale romantique, Cyprien Gaillard est un artiste qui arpente le monde afin de recueillir les indices de son inéluctable ruine. Ses vidéos et Polaroids rassemblent des sites aux architectures variées et époques disparates, annihilant ainsi toute hiérarchie et toute temporalité dans sa démonstration d’un désordre généralisé auquel nulle utopie et nul individu ne peuvent résister.
Cyprien Gaillard a d’abord été attiré par les qualités pittoresques de la ruine romantique avant d’élargir ses recherches de manière plus générale aux traces de l’homme dans la nature. Il n’a pu échapper à l’histoire du Land Art dont il conserve essentiellement la notion d’entropie (tout finit par se dégrader et ce, de manière irréversible) chère à Robert Smithson. La pratique du Land Art est aujourd’hui digérée, l’enjeu pour les artistes n’est plus de construire des dispositifs monumentaux dans la nature. Cyprien Gaillard appartient à une nouvelle génération de plasticiens qui constatent les chantiers en cours, relèvent le caractère entropique des sites occupés et exploités par l’homme. Cyprien Gaillard explique: «je regarde le monde tel qu’il est aujourd’hui et je le perçois. Il arrive sous forme de relique.»
Le Frac Poitou-Charentes compte l’une de ses œuvres dans sa collection depuis 2010. La grande allée du Château de Oiron (2008) est une photographie qui, au travers d’un cadrage frontal et d’une atmosphère stricte, rend compte d’une intervention de l’artiste dans le célèbre domaine renaissant des Deux-Sèvres: sous l’apparat de l’allée d’honneur, se cachent en réalité les gravats (béton concassé, bois, plastique, verre) résultants de la destruction d’une tour HLM à Issy-Les-Moulineaux. Importés par l’artiste, ces rebuts deviennent un monument invisible, le tombeau d’un immeuble détruit, la ruine d’une utopie moderniste rapportée sur un site patrimonial prestigieux. Certes discret, cet acte de vandalisme se fait l’écho de politiques de la ville tout aussi vandales, des solutions à court terme et créatrices de ghettos.
Cities of gold and Mirror, la vidéo proposée dans «The Player», est constituée de cinq scènes tournées en 16 mm au Mexique, plus précisément à Cancún et ses environs. L’artiste y met en relation des formes récurrentes, comme atemporelles, déjà effondrées ou en cours d’effondrement. Cancún est principalement dédiée à l’accueil du tourisme de masse avec pour objectifs détente et loisir. Certains des bâtiments s’inspirent vaguement du profil pyramidal des architectures précolombiennes voisines.
Durant le Spring Break, de jeunes américains s’y saoulent allègrement, au risque de la mort. Sites détruits et lieux de destruction, chaque chose et chacun y apparait comme une ruine. Les scènes se succèdent (un chef de gang dans un site archéologique Maya, la destruction d’un bâtiment, une boîte de nuit gigantesque) au son d’une musique entêtante. Paraissant grave, celle-ci est tirée du dessin animé Les Mystérieuses cités d’or qui, au travers d’un certain émerveillement, a été le moyen de découverte de la culture précolombienne pour la génération à laquelle appartient l’artiste.
Informations pratiques
Le Frac sera fermé du 21 décembre 2014 au 1er janvier 2015 inclus
Vernissage
Mardi 9 décembre 2014