Alexandre Singh
The Chorus
«The Chorus», la nouvelle exposition d’Alexandre Singh à la galerie Art:Concept fait partie intégrante d’un projet d’envergure sur lequel il a travaillé lors de sa résidence au Witte de With à Rotterdam. Commissionnée par cette même institution et Performa 13 à New York; The Humans est une œuvre totale: une pièce de théâtre en trois actes dans laquelle évoluent des personnages jouant tour à tour sur les codes de représentations issus d’univers variés allant de réminiscences aristophaniennes au grotesque de Daumier ou au fantastique de Tolkien.
The Humans (Les Humains), vaste entreprise à laquelle s’attèle Alexandre Singh; plongeant ses protagonistes dans un monde allégorique avec une montagne comme élément central séparant la scène en deux royaumes: l’un apollinien domaine du génial et immuable sculpteur Charles Ray, l’autre dionysien régi par N, la Reine lapine, agile et sournoise dont les penchants scatologiques ne sont pas en reste. Au sein de ces deux mondes très différents, deux enfants, Tophole, le fils de Charles Ray et Pantalingua, la fille de la Reine N, vont comploter et faire souffler un vent de chaos en donnant vie à des sculptures.
De la pierre naît la chair, et de cette chair des individus auxquels les deux compères vont insuffler passion et désir mais aussi envie et pouvoir. Ces humains, à peine créés, vont se rebeller et dévoiler leurs imperfections et appétits divers. Confusion, corruption, leadership ou autres brutalités, Alexandre Singh donne naissance, avec cette pièce, à une œuvre protéiforme, une œuvre totale en adéquation avec son travail plastique, lui qui multiplie les médiums et autres supports.
De cette pièce découle la présente exposition, «The Chorus», pour laquelle l’artiste a choisi de montrer la série complète de douze bustes correspondant aux masques portés par les personnages de la pièce, une fois ceux-ci devenus humains. Ces masques à l’allure grotesque, flirtant avec la tragédie grecque ou les caricatures d’un Honoré Daumier ou d’un James Gillray, deviennent de solides bustes en bronze. Quand on les regarde, ces bustes sont doubles. Ils sont à la fois les supports de ces masques, qui semblent posés comme avant une représentation, des bustes bruts, ciselés au burin. Mais en même temps ils deviennent autant de visages grimaçants et brutaux, un masque sur le masque en quelque sorte.
Le travail d’Alexandre Singh qu’il s’agisse de The Humans ou de ses précédents travaux comme les Assembly Instructions, la série sur The Economist ou les nombreuses performances qu’il a pu réaliser, repose sur des références aussi bien psychologiques, philosophiques, qu’historiques sur la nature de notre monde et des hommes, des objets qui le peuplent et sur ce lien social qui réunit les hommes; lien dont le contour est finalement lui-même empirique car rattaché à un Etat ou un pouvoir établi tentant de divulguer des valeurs intrinsèques à tous et de bricoler par la même occasion de possibles alliances.
Alexandre Singh décompose ce panorama, recompose des images, les réassemble, joue sur les codes artistiques pré-établis et développe sa propre logique de pensée. Il ne s’agit pas seulement d’une grammaire artistique mais aussi d’une figuration particulière de la mise en forme du langage lui-même.
Artiste? Démiurge? Prédicateur? Philosophe d’un autre temps? Alexandre Singh livre en tout cas une tragédie moderne qui ne manquera pas d’interpeller le spectateur et de l’amener à s’interroger sur cette humanité, son fondement mais finalement à s’interroger sur lui-même et la place qu’il occupe dans ce chœur d’êtres humains.
Vernissage
Samedi 6 septembre 2014 Ã 18h