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Textuel n°52. Lectures de l’art contemporain

La revue Textuel, publiée par l’UFR Lettres, Arts et Cinéma de l’Université Paris-Diderot, évoque les diverses lectures de l’art et l’importance du récit dans les modes d’expression artistiques depuis les années 1970.

Information

  • @2007
  • 22-744201-271
  • \15€
  • E116
  • Zoui
  • 4français
  • }165 L - 250 H

Présentation
Magali Nachtergael
Textuel n°52. Lectures de l’art contemporain

Extraits de l’avant-propos «Les lectures de l’art contemporain (1970-2000)»
«Lorsque s’est tenue, en avril 2006, la journée d’études «Lectures de l’art contemporain, fictions et narration», à la même période, le Palais de Tokyo se proposait de présenter la scène artistique française sous la forme d’un panorama actuel dont le titre était «Notre histoire…». […] Cette mise en histoire du contemporain s’offrait manifestement au regard d’un lecteur en quête de récit : celui certes de l’art qui se construit chaque jour mais aussi celui d’œuvres qui n’hésitent pas à se montrer volubiles. […]
Le premier texte de ce recueil, «Quand les œuvres racontent des histoires», évoque, en guise de préalable historique, le fil qu’ont suivi quelques œuvres et leurs créateurs pour construire les récits de l’art depuis la création d’un «mythe», une fable artistique, autour de la fameuse Fountain de Marcel Duchamp.
Ce bavardage des œuvres a trouvé, face à la montée en puissance des productions narratives dans les années soixante-dix une appellation précise, le «Narrative art». Ni mouvement, ni genre, les œuvres dites narratives occupent un terrain de jeu où raconter ne correspond plus à aucun critère de narration connu et où le récit doit juste être identifié, derrière les multiples formes sous lesquelles il se cache, ne laissant même parfois flotter qu’une simple atmosphère diffuse de récit. À partir de quelques images et fragments en série, Perin Emel Yavuz analyse la mécanique de ces «microséquences» qu’élaborent ces amorces narratives dans lesquelles le texte accompagne de temps à autre le mouvement inachevé du récit.
Ainsi, la question du montage se révèle primordiale pour la délicate entreprise qu’est la narration émiettée et le démontage historique auquel se livre Johan Grimonprez dans son documentaire vidéo Dial H-I-S-T-0-R-Y. En proposant un chemin de traverse entre récit historique et projection sur le moniteur vidéo (télévisé, plus précisément), Johan Grimonprez aborde avec un humour noir les détournements d’avions en détournant à son tour le nouveau sens de l’Histoire que les terroristes voulaient écrire.
La mise en scène de l’histoire contemporaine tiendrait d’une part à son séquençage et d’autre part, à cette relation subjective, voire politique, que le documentariste entretient avec son objet. Cette relation n’est pas réservée aux journalistes qui fournissent à l’Histoire ses images : Giuliano Sergio pointe à travers les Vérifications du photographe Ugo Mulas, les marges ambiguës entre le travail de l’artiste Jannis Kounellis et celui du documentaire qu’en fait Mulas. Cette documentation, contrôlée par les deux protagonistes, participe aussi d’une fabrique de l’histoire qui sans vraiment falsifier, reconstitue artificiellement les événements dans un souci d’anticipation du récit qu’il en sera fait. On entre alors dans une fiction de l’histoire, une histoire qui s’écrit en même temps qu’elle a lieu mais dont le sens est entièrement déterminé par son traitement en image.
Cette introduction aux mises en récits à travers divers médias débouche sur un second volet qui entre au cœur du récit pour explorer au plus près ces stratégies fictionnelles. Du cinéma, en passant par les installations ou interventions médiatiques, à la photographie, des personnages à l’identité indéfinie, figures labiles et évanescentes, évoluent dans des environnements rendus fictifs par leur présence fantomatique. Cécile Camart dévoile les stratagèmes romanesques de Marcelline Delbecq et Agnès Geoffray, jeunes artistes qui utilisent le texte, l’image et des objets du quotidien pour mettre en scène des atmosphères narratives parfois fantastiques. Utilisant les ressorts du roman, les artistes manigancent leurs trames sur des supports insolites, comme un tampon encreur géant ou un crochet de boucherie. Pris au jeu de ces fictions, certains semblent s’y jeter à corps perdu, comme Thomas Lélu qui investit le genre populaire de la fanfic (fan fiction) pour s’inventer une histoire d’amour avec Catherine Deneuve: la série intitulée simplement Catherine conserve précieusement des preuves-souvenirs de cette histoire qu’ils auraient vécue à travers des clichés de films. Ainsi, Jean-Max Colard à travers la notion de «filmographie du personnage» débusque chez un florilège d’artistes comme Lélu, un certain goût pour la mise en scène de soi et le travestissement de la réalité, conduisant à redéfinir la notion même d’identité.
Ces œuvres multiples, polymorphes, sans cesse renouvelées, interrogent notre regard de spectateur mais aussi notre imaginaire de lecteur, voire, notre intime capacité à fabuler. Amaury Da Cunha, photographe et écrivain, appelle ces interstices des «Saccades» qui développent une temporalité propre à la photographie et à l’écriture. On peut alors se demander comment regarder et analyser des œuvres qui utilisent du discours, du récit ou encore de la fiction dans des dispositifs signifiants ? Ces œuvres appellent toutefois un autre regard critique, un regard qui pourrait considérer les signes, le texte et les images comme un tout dont l’esthétique reste encore à définir.»

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