Dans un espace de travail schématique, les danseurs attendent immobiles, assis devant leurs écrans d’ordinateur. L’inaction demeure le temps d’un long prologue informatif posant la trame d’un conflit politique déroutant, opposant les Etats-Unis à des forces extrémistes protestantes suisses.
De cette information journalistique récitée en plusieurs langues, Gilles Jobin construit une scène chaotique où la danse ne tient finalement qu’un petit rôle. En effet, la chorégraphie est rapidement absorbée par le développement d’une scénographie et de mouvements économes décrivant un champ de bataille. L’installation géométrique de fils tendus par les danseurs est une reconstitution figurée de la toile du net ; elle parcellise l’espace et devient le chapiteau sous lequel se joue la guerre.
Les danseurs s’effondrent, rampent entre les objets devenus débris, roulent à terre derrière les flammes que retransmettent çà et là les écrans d’ordinateur déposés au sol. La vision traumatique s’équilibre en une écriture surréaliste et l’on croirait presque assister à l’élaboration en temps réel d’une action automatique.
Ainsi, Gilles Jobin parvient à figurer notre passivité face à la médiatisation du drame, éprouvé seulement au travers d’images et de sons numérisés. Avec Text to Speech, il s’affranchit du genre chorégraphique pour réaliser une performance artistique. Et malgré son évidente aridité formelle, la pièce résonne comme la parole d’un artiste face à l’histoire et à la crise.
Horaires : 20h30. Création pour 6 danseurs, 2008.
— Chorégraphie : Gilles Jobin
— Musique: Cristian Vogel
— Lumières: Daniel Demont