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Terrain vague

PMarie-Jeanne Caprasse
@24 Sep 2008

Samuel Rousseau recueille des objets inertes et leur rend une vie rêvée par le truchement de la vidéo. Le rebus, la chose morte, garde une mémoire de vie révélée par la construction d’un double virtuel.

Le travail de Samuel Rousseau repose sur la transformation des objets du quotidien par le moyen de la projection vidéo. Ici, il insuffle vie à des objets inertes comme des pneus, une branche d’arbre ou une bougie, ou plutôt reconstitue une fiction de leur possible vie passée.

Par la magie de la projection vidéo, l’artiste prolonge l’ombre d’une branche morte en arbre majestueux. La métamorphose est à peine perceptible et lorsque l’arbre atteint son maximum de croissance, les fleurs bourgeonnent puis éclosent, pour enfin laisser place aux feuilles qui vibrent au vent puis tombent et disparaissent sur le sol.

On assiste au cycle complet de la vie d’un arbre, déroulement simple s’il en est mais c’est de la finesse du dispositif mis en œuvre que naît l’enchantement. Cette ombre vivante fait penser à un ectoplasme, une trace de substance émanant de la branche morte. La coexistence entre l’ombre de la branche  réelle et sa vie prolongée comme dans un souvenir de son passé, de son heure de vie, donne une vraie valeur poétique au dispositif.

Encore plus simple et épurée, l’installation à la bougie questionne l’évidence de notre perception. Confronté à la redondance de la bougie, dans sa version de cire et dans celle de son ombre projetée sur le mur additionnée d’une image de flamme virtuelle, notre œil enregistre l’image d’un cierge allumé. Comme une vision rêvée de l’âme de ce bout de chandelle.

Au milieu des puits de pneus en caoutchouc noir de la série Vortex, on découvre des écrans vidéo sur lesquels de petites voitures font la ronde, entraînées dans un mouvement perpétuel. Cette fantaisie lumineuse nous immerge dans la vie passée de ces objets maintenant inertes, pneus dont le sens et la pertinence résident dans le roulement, kilomètres après kilomètres.

Œuvres sensibles, fines, ces installations de Samuel Rousseau évoquent un travail d’archéologie des objets. Et par la précision de leur mise en œuvre, elles troublent la vision, l’image réelle cohabitant de manière tellement évidente avec l’image virtuelle.

Samuel Rousseau
— Sans titre ( l’arbre et son ombre ), 2008. Projection HD et modélisation 3D (Raphaël Bot-Gartner). 13 min en boucle.
— Vortex, 2008. Projection vidéo. 6 min en boucle.
— Un peu d’éternité, 2008. Projection vidéo. 11 min en boucle.

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