Communiqué de presse
Tere Recarens
Tere Recarens
Frédéric Oyharçabal. Au retour de ton second séjour dans le Dersim (Turquie), tu m’as envoyé une photo où l’on voit un homme qui grimpe une colline en courant. Une de tes premières oeuvres est la peinture d’une «fille qui court ou rien» — Chica que corre a la nada. En 1996, tu as placé ton appareil photo dans une cour d’immeuble et tu as réussi à descendre tous les escaliers en quinze secondes, le temps que met ton appareil en position automatique pour prendre la photo (J’ai réussi, 1996). Pourquoi aimes-tu tant courir?
Tere Recarens. Je cours par nécessité et curiosité.
Bien que tu sois établie à Berlin, tu n’y restes jamais très longtemps. Qu’est-ce qui te fait à ce point courir le monde?
Tere Recarens. À Barcelone, on m’appelle Terremoto (tremblement de terre).
À ton arrivée à Berlin, tu as tourné un petit film où, pendant une minute de chute libre en parachute au-dessus de Berlin, tu balaies les nuages (Beserein, 2003). À New York, où tu as aussi vécu, tu projetais de sauter du plus haut bâtiment de PS1 (I was ready to jump, 1999). Que signifie sauter pour toi?
Tere Recarens. Chaque saut est une confrontation avec une nouvelle culture.
Tu m’as écrit un jour: «Je sais ce que c’est une âme et un spirit», et tu as dessiné une bougie. Dans le Dersim, l’été dernier, nous avons fait à pied un parcours dans la vallée de la rivière Munzur pour visiter les lieux de culte Alévis. Tu nous as proposé, comme le font les Alévis, de poser une bougie à l’intérieur de la petite niche que l’on trouve dans chaque holy place et de faire un voeu. Dernièrement, tu m’as cité cette prière que l’on dit au Tibet: «Puissent tous les êtres vivants s’élever».
Tere Recarens. J’ai des rêves. C’est la félicité, pas l’argent.
Tu dessines beaucoup. Parfois tes dessins me laissent incertain.
Tere Recarens. Je dessine comme je me lave le visage.
Tu as tourné sur toi-même 127 fois avant de tomber (Tomber, 1997). Il y a cette photo prise à PS1 où l’on te voit t’entraîner à sauter. Le titre de la photo est Fall in love (1999). Dans le livre qui raconte ton séjour au Mali, on peut lire cette phrase brodée sur un tissu: «Allons au lit mon amour ma chérie». Est-ce que l’amour et l’ivresse sont des thèmes importants dans ton travail?
Tere Recarens. J’aime le langage du corps: des signes, des sons et du coeur.
Peux-tu me commenter ce message écrit sur un tissu du Mali: «Regardez avec des yeux nouveaux».
Tere Recarens. Ce que j’ai appris au Mali, c’est la dualité.
Veux-tu dire quelque chose sur ton exposition ?
…
Entretien de Tere Recarens par Frédéric Oyharçabal, décembre 2010.