Formafantasma, Andrea Trimarchi, Simone Farresin
Temporanea
Depuis le début, le travail de l’agence Formafantasma se caractérise par une certaine manière de regarder en arrière tout en tissant de nouvelles trames, de nouvelles histoires qui se greffent sur les précédentes. La mémoire et le souvenir deviennent l’occasion de se rattacher à un cycle d’expériences plus vaste et plus durable. Se tourner vers le passé constitue donc le premier pas pour regarder devant soi, dans le présent et au-delà , comme le souligne l’une de leurs déclarations d’intention: «Looking back for looking forward» (Regarder en arrière pour aller de l’avant). Le recours aux méthodes traditionnelles de production artisanale devient donc l’instrument d’une enquête critique sur les modalités du faire, un instrument qui reste étranger à toute nostalgie.
Le but de Formafantasma est de détecter les procédés, d’éclairer les motivations, de découvrir les causes qui conduisent à la création d’objets usuels, qu’ils soient considérés pour leurs matériaux, leurs formes ou leurs modes de réalisation. La forme n’est donc que le dernier acte, le résultat d’un travail spéculatif qui s’ouvre au réel pour saisir les signes d’une lecture puisant autant dans la science que dans l’art, dans la technique que dans la poésie, dans les détails que dans le symbole. Aussi, la progression de l’exposition Temporanea est-elle l’occasion de démêler le fil de cette histoire à la fois précise et cohérente, fidèle à elle-même et toujours prête à se renouveler en s’adaptant à de nouvelles pistes de recherche. Chaque objet incarne un projet plus vaste que les deux designers abordent dans un mélange inédit de raison et d’intuition savamment dosées.
L’exposition que le duo de Formafantasma présente à Paris, nous offre donc le tableau des éléments d’une méthode de projection du design, la mise à nu d’une forme mentale, plus encore qu’elle ne constitue la synthèse de cinq années d’études et de réalisations. Chaque objet illustre la manière dont est défini progressivement le choix d’un fil conducteur : il peut s’agir d’un matériau, mais aussi de l’histoire d’un objet ou d’un individu. Ce fil permet de retrouver les techniques et les figures du passé, emplies d’une nouvelle sève créatrice par ce regard original qui saisit en profondeur mais avec légèreté les fragments d’une histoire s’écoulant sans cesse.