Claire Fontaine
Téléphone arabe
Pour sa première exposition à la galerie Air de Paris, Claire Fontaine s’intéresse aux mécanismes de déformation des messages politiques. Un caisson lumineux montant l’image étrangement pixélisée de trois émeutiers en Grèce pendant l’été 2006 fait partie d’une série intitulée «Visions du monde», entièrement consacrée aux confusions et aux incompréhensions dans l’information globalisée. Deux textes en néon réactivent des inscriptions murales trouvées dans les rues de Paris. L’éternité par les astres est un hommage aux prisonniers politiques de tout temps et de tout lieu, par intermittence il éclaire les armes et les larmes comme conséquences constantes du monopole de la violence. Il y a trop d’innumaniter est j’ai pas trouver mon droit vient du campement des sans abri du canal Saint Martin, le sens de la phrase triomphe de la rigidité de la grammaire et affirme la peine de la pauvreté comme la seule règle valable pour ceux qui n’ont rien.
Les sculptures qui se trouvent au sol, les brickbat ainsi que la play-station diffusant une version muette de La Société du Spectacle de Guy Debord, interrogent de manière impertinente le pouvoir du langage sur les corps et les rapports entre culture et marchandises. Deux drapeaux brodés de textes rappellent les soubresauts nationalistes qui ont secoué ces dernières années la France et ses habitants.
Une «sculpture de poche» est accrochée juste à côté de la porte d’entrée, il s’agit d’une copie des clés de la galerie, obtenue avec une technique ultra-rapide utilisée par la CIA et à la portée de tout internaute. Elle rappelle une valeur d’usage de l’œuvre d’art qui est la possibilité de désorganiser les mécanismes de la propriété privée ou du moins d’en questionner l’évidence. Un texte intitulé Notes en bas de page sur l’état d’exception et un plan de la France tiré d’un atlas pour des écoliers arabes sont posés au sol et offerts aux visiteurs. Ils rappellent que la guerre n’est pas seulement loin de nous, dans des pays étrangers, mais au cœur de ce qu’on croit le plus intime et le plus protégé par le système capitaliste global.
Article sur l’exposition
Nous vous incitons à lire l’article rédigé par Julia Peker sur cette exposition en cliquant sur le lien ci-dessous.
critique
Leonor Antunes, Claire Fontaine