L’œuvre de Josep Grau-Garriga est à l’honneur à la galerie Nathalie Obadia, avec l’exposition « Tapisseries : 1970-2011 », première exposition personnelle en France depuis la disparition de l’artiste catalan en 2011.
Une figure pionnière de la tapisserie contemporaine
L’exposition offre une rétrospective de l’ensemble de la carrière de de Josep Grau-Garriga à travers dix-huit tapisseries. De 1970 à 2011, le parcours chronologique permet de mesurer l’évolution de cette figure pionnière dans l’art de la tapisserie contemporaine.
La pièce intitulée Ferides I (Blessures I), réalisée en 1970, témoigne d’une démarche délivrée des règles encadrant traditionnellement le tissage. La maîtrise atteinte par Josep Grau-Garriga dans l’art de la tapisserie l’encourage paradoxalement à abandonner les techniques de haute-lice pour faire du tissage un mode d’expression pleinement artistique et libre. Les œuvres telles que Ferides I forment de véritables sculptures tissées dans lesquelles les fibres textiles sont exploitées comme un matériau à part entière, au service de créations complexes et personnelles. Les couleurs et les formes qui se déploient par le tissage ne suffisent pas : le relief même de la tapisserie est exploité. L’irrégularité de la trame ici, là la succession cadencée des lignes atteignent une évocation sensible.
Des œuvres tourmentées marquées par l’engagement politique
L’influence de l’art informel et de ses acteurs majeurs, tels que Jean Dubuffet, Alberto Burri et Jean Fautrier se lit dans la dimension profondément organique des créations de Josep Grau-Garriga. Ainsi l’œuvre intitulée … I la mort tanbé, (… Et la mort aussi), réalisé en1972, présente une surface de longs fils rouges pendants dont la béance centrale laisse apparaître des tentacules roses. Les mouvements qui agitent la surface textile, les surprenantes excroissances qui en jaillissent correspondent aux thématiques tourmentées qui les inspirent. Les événements politiques vécus par l’artiste pendant son adolescence en Espagne, lors de l’installation de la dictature franquiste l’ont profondément marqué et pèsent sur son travail des années 1970.
Les matériaux pauvres et rustiques prédominent. : ficelle, chanvre, sacs récupérés, jute, sisal, chutes de laines… Ils incarnent l’attachement de Josep Grau-Garriga à la culture rurale, à son identité catalane et à des engagements politiques qui se lisent aussi par des références symboliques. La tapisserie doit pour lui être un art inscrit dans son époque, un art rude qui témoigne de l’histoire.
La dernière décennie de la carrière de Josep Grau-Garriga est marquée par une sérénité nouvelle. Installé dans la région angevine, l’artiste catalan s’y consacre à une relecture de l’histoire de la peinture française et à un art apaisé. Les tapisseries des années 1990 et 2000 sont inspirées des paysages naturels, baignées de la lumière des bords de Loire et reflètent un bonheur délivré des aspirations militantes et des tourments des premières années.