Ilya et Emilia Kabakov
Tableaux volants
La galerie Thaddaeus Ropac présente une nouvelle exposition de peintures d’Ilya et Emilia Kabakov, «Tableaux volants», présentée à partir du 17 mars 2010. Ces œuvres récentes s’inscrivent dans le prolongement d’une recherche que les artistes poursuivent depuis une dizaine d’années, sur le thème des images du passé qui volent comme des feuilles mortes sur le fond blanc des tableaux.
Les grandes toiles horizontales ou verticales se transforment en écrans de cinéma. Les artistes nous donnent à voir un monde vierge, une page blanche de l’histoire et de l’imaginaire où ils captent des fragments du passé, comme autant de vues cinématographiques reconstituées d’après l’iconographie de progagande de leur enfance russe. Quelqu’un regarde un album de famille ou une collection d’affiches anciennes et c’est toute une époque qui resurgit au fil des scènes de la vie ordinaire.
Voici des étudiantes au bord d’un fleuve, le regard tourné dans la même direction. L’image, placée de travers en haut à gauche de la grande toile blanche, semble tombée par hasard dans le tableau. La mémoire peut restituer une part de l’émotion de jadis, mais le monde qui l’entoure a disparu à jamais. Le couple Kabakov présente ce monde révolu avec tout le recul et l’objectivité d’un cinéaste derrière sa caméra, ce qui a pour effet de rendre encore plus émouvantes les scènes saisies au vol, aussi quotidiennes soient-elles.
Voici maintenant des hommes au travail. Un vétérinaire et son assistante conduisent une vache rétive sur une allée. Un apiculteur en tenue de protection récolte le miel en soulevant les rayons de la ruche, mais l’image, tombée en bas de la toile, s’aplatit sur le long bord horizontal. Ayant glissé en biais, elle a un côté plus grand que l’autre et la silhouette de l’apiculteur subit des déformations à mi-chemin entre la peinture maniériste, le cinéma futuriste russe et les gros plans de Sergueï Eisenstein sur la réalité quotidienne. Le travail est noble, la vie de tous les jours a ses rythmes et ses joies. L’humour et la tendresse imprègnent ces œuvres où transparaît l’idéalisme utopique qui sous-tend l’univers pictural des Kabakov. Leurs peintures nous parlent du temps, de l’espace, de la tradition iconographique russe et du plaisir esthétique que les œuvres d’art authentiquement originales parviennent souvent à procurer par des moyens subliminaux.
En février 2010, Ilya et Emilia Kabakov réalisent une installation de sculptures pour la création mondiale du nouvel opéra de Peter Eötvos Tragödie des Teufels (La Tragédie du diable) au Nationaltheater de Munich. Ils présenteront des dessins préparatoires de ce projet lors de l’exposition à la galerie.
Publication
Un catalogue d’exposition conçu par les artistes et rédigé par Rod Mengham, du Jesus College à Cambridge, paraîtra à l’occasion de l’exposition. La série complète des «Tableaux volants» y sera reproduite en couleur.
critique
Tableaux volants