Julie Aminthe. Une baisse des crédits de 34,1 millions d’euros pour la mission culture… Telle est la nouvelle «lubie» du gouvernement Sarkozy. Malgré les inquiétudes du Sénat, le monde de la culture risque fort de subir, en avant première, la politique d’austérité défendue par l’actuel président. Quel est votre regard à ce sujet?
Sylvie Robert. Tout d’abord, il faut réaffirmer que la culture n’a pas été une priorité du quinquennat de Nicolas Sarkozy, c’est le moins que l’on puisse dire. Entre la fragilisation, voire une dé-légitimation du ministère de la Culture, une RGPP (révision générale des politiques publiques) qui a frappé violemment les administrations, une absence d’orientations ambitieuses pour la culture dans notre pays, c’est aussi un désengagement inédit de l’Etat en matière financière qui marquera la présidence du candidat-président. A coup de baisse régulière du budget, de gels dégelés ou pas, il est évident que les promesses du président de la République de préserver le budget de la culture n’ont pas été tenues, et 2012 sera une fois encore l’année de l’austérité culturelle. Cette politique est mortifère car elle n’offre aucune stabilité, aucune visibilité, aucune confiance à un secteur d’activité essentiel de notre société, dynamique et créatif – élément d’histoire, d’échanges, de cohésion et de rayonnement de notre pays.
Je rajouterai que ce gouvernement a instauré pour la culture la double peine puisqu’il s’est attaqué aux collectivités territoriales, actrices principales de l’accompagnement financier du monde de la culture aujourd’hui. Il les a étranglées pour les empêcher de continuer d’intervenir sur un secteur dont on sait qu’il n’est pas une des compétences obligatoires des collectivités territoriales.
Ce que l’on a constaté pendant cinq ans, c’est l’écart entre les discours et les actes – promesses faites et non tenues – les discours et la réalité vécue par les artistes et les acteurs du monde de l’art et de la culture.
Ce que l’on retiendra, c’est tout simplement l’abandon d’une ambition culturelle pour notre pays. Abandon qui a des conséquences graves pour la vitalité de la création artistique, pour la reconnaissance des artistes – de leur rôle et de leur place essentielle dans notre société, pour l’emploi, pour l’image culturelle de notre pays à l’extérieur mais aussi et surtout pour la cohésion sociale.
La loi Hadopi a fait couler beaucoup d’encre depuis sa création. François Hollande propose de la supprimer en mettant en place l’acte II de l’exception culturelle. De quoi s’agit-il exactement?
Sylvie Robert. Le défi à relever demain, c’est la révolution numérique. François Hollande a promis de remplacer la loi Hadopi, qui n’a fait qu’opposer artistes et internautes, par une loi «acte 2 de l’exception culturelle». Cette dernière devra définir un nouveau cadre économique et juridique pour l’Internet et pour les artistes, défendre la liberté mais aussi les droits moraux, patrimoniaux des auteurs, compositeurs et interprètes. Elle sera fondée sur trois principes fondamentaux: le développement de l’offre légale, la lutte contre la contrefaçon commerciale et l’élargissement des sources de financement, notamment en les prenant chez les opérateurs et industriels.
En quoi la culture est un enjeu majeur aux yeux du Parti socialiste?
Sylvie Robert. La culture doit être une grande ambition nationale, «une force qui doit être capable de dépasser ce qui peut nous opposer», selon les mots mêmes de François Hollande. C’est permettre que la nation «retrouve son identité, la seule qui vaille: celle de nous permettre de vivre ensemble dans la diversité et en même temps dans le partage de valeurs communes, de principes qui nous unissent».
Les questions de la place et du rôle de l’artiste dans notre société, du soutien à la création, du renouvellement des formes, de la transmission sont des priorités pour le parti Socialiste car elles fondent les valeurs d’un pays qui parie sur l’avenir, la recherche, et sur l’émancipation de tous.