Sven Kroner, Fabien Rigoret
Sven Kroner et Fabien Rigoret
Sven Kroner, «Islands»
La galerie Anne de Villepoix présentera du 4 mars au 16 avril prochain la première exposition personnelle du peintre allemand Sven Kroner. Elle sera l’occasion de découvrir les toutes dernières toiles de l’artiste, principalement de grands formats, ainsi qu’une sélection parmi ses œuvres exécutées ces dernières années.
Né à Kempten en 1973, Sven Kroner a passé sa jeunesse à Allgäu dans les Alpes bavaroises. De 1994 à 1999, il a étudié à la Kunstakademie de Düsseldorf avec le professeur Dieter Krieg. Il a reçu une bourse de voyage de l’Académie et le prix Paul Strecker en 1998. En 2000, la ville allemande de Stadtlohn lui a attribué un prix de soutien aux jeunes artistes. Actuellement, Sven Kroner vit et travaille à Düsseldorf.
Le paysage est un thème récurrent dans l’œuvre de Sven Kroner. Il fait référence le plus souvent à la montagne et à la région d’origine de l’artiste dans le sud de l’Allemagne. A travers des séries comme celle des autoroutes (2000/2001) ou des paysages de neige et d’avalanche (2002/2003), Kroner revisite le genre traditionnel du paysage en nous proposant sa vision ambivalente et souvent humoristique d’une nature vierge transformée par l’homme et le tourisme.
Les personnages, stéréotypes de citadins à la recherche d’activités récréatives en pleine nature, jouent toujours un rôle important et sont représentés isolés ou en petits groupes. Ils semblent attendre que quelque chose advienne et s’efforcent de passer le temps de manière plaisante en pratiquant des activités de plein air telles que le ski, la promenade ou encore la baignade. Sven Kroner choisit souvent de placer ses personnages en opposition au reste du paysage, face à une nature vertigineuse. Au premier regard, la composition apparaît vraisemblable, pourtant Sven Kroner joue sur la juxtaposition de plusieurs points de vue et sur l’exagération des angles créant ainsi un déséquilibre. La distorsion de la perspective suggère alors une sensation de vitesse laissant penser qu’une catastrophe est imminente.
Sa peinture lumineuse et très colorée dans les premières années, utilisant de larges touches de couleurs vives, a peu à peu évoluée vers une représentation plus élaborée et plus détaillée aujourd’hui. Cependant, la couleur reste l’élément qui sous-tend la composition, crée le mouvement et donne un caractère abstrait à une évocation réaliste de la nature. Les aplats de couleur renforcent les zones d’opposition entre les différents plans. Ce contraste entre les plans est rendu plus intense encore par la juxtaposition de parties peintes en touches nerveuses et rapides et d’aplats lisses ou brumeux. Sven Kroner joue également sur l’opposition entre des lignes verticales, celles de la cabane de bois, des pylônes ou des piles de ponts généralement seuls éléments stables suscitant une idée de constance, de continuité face à des lignes obliques évoquant la vitesse, la chute ou encore une certaine précarité. Ainsi naît le sentiment que la scène apparemment paisible pourrait basculer à tout moment que l’inconnu pourrait prendre le pas sur le connu.
Sven Kroner donne à voir des images complexes et fait naître chez le spectateur un certain trouble et la sensation de perdre prise avec le réel. Sa peinture à la fois emprunte de fraîcheur et d’ironie est un moyen pour l’artiste d’évoquer ses souvenirs avec nostalgie et de questionner la part de subjectivité de chaque expérience vécue.
Fabien Rigobert, Topanga Ground»
La galerie Anne de Villepoix présentera en show-room une installation vidéo de l’artiste français Fabien Rigobert. Né en 1968, il vit et travaille à Paris et a été lauréat du prix Altadis en 2004.
Dans ses précédents travaux Fabien Rigobert a abordé une réflexion sur le rapport existant entre l’identité du sujet et celle de l’image. En théâtralisant l’ordinaire, il modifie la perception du « banal » il interroge et réorganise le réel par la mise en scène de personnages. À travers ses dernières vidéos et photographies réalisées à Los Angeles, il conduit une recherche sur la pluralité des lectures que nous offrent les images, obligeant ainsi le spectateur à jouer un rôle d’interprète.
Topanga ground a été précisément réalisée en 2004 à l’occasion d’un séjour de l’artiste à Los Angeles. Ici la confrontation d’une vidéo et d’une photographie souligne l’écart existant entre les deux media, la vidéo montre le jeu des acteurs alors que la photographie souligne l’interaction des corps.
Dans Topanga Ground les protagonistes sont autour d’un feu, un homme assis sur une chaise roulante se lève et brûle une pancarte « save yourself ». Les flux et la généralisation progressive d’événements catastrophiques affectent non seulement la réalité du moment, mais causent l’anxiété et l’angoisse. Devant le surgissement d’événements inattendus découle un constat d’impuissance.
«Je développe dans des lieux d’entre-activités un répertoire corporel celui du trouble, de l’absence, de l’oubli, une forme d’abandon. Il s’agit du tourment des figures suite à un drame pressenti ou « hors champs », une écriture visuelle de l’avant ou après désastre. Je travaille sur la collusion, la fracture entre l’intime et le monde extérieur, l’avènement de l’événement. Les personnages sont dans une interaction physique par la présence de leur corps, mais isolés mentalement. Les regards, le placement, les attitudes des acteurs se construisent autour d’un repli intérieur. La vidéo est constituée à partir de séries photographiques grâce à un logiciel d’interpolation. Les vidéos sont des tableaux vivants, une constitution de fresques laïques.»
critique
Islands