Utiliser le cinéma comme outil fédérateur, telle est l’idée de Clemens von Wedemeyer. L’artiste allemand a choisi Mardin, ville turque aux nombreuses populations et obédiences (kurdes, arabes, turques, araméennes, chrétiennes, musulmanes, etc.) pour mener à bien son projet.
Ainsi, en bordure de la ville, au sein d’un paysage aride et rocailleux, se dresse un écran géant, flanqué d’un amphithéâtre creusé à même la pierre. Les habitants de Mardin s’y retrouvent pour des projections de films, une façon de se rassembler sous la houlette de la culture. D’autant qu’avec l’arrivée de la télévision dans les foyers, les habitants de Mardin avaient vécu près de vingt-cinq ans sans cinéma en fonctionnement, jusqu’à ce qu’une association ait décidé de rouvrir une salle l’année dernière.
«Sun Cinema» est donc une proposition de Clemens von Wedemeyer, nommée ainsi car pensée selon les inclinaisons du soleil — à certaines heures, les personnes passant à proximité de l’écran s’y voient reflétées.
L’exposition comporte des photographies couleur, à la fois sortes de making of du projet et photographies d’art, l’écran rigide de six mètres de haut perdu dans un paysage lunaire se prêtant bien à ce genre d’exercice. Une maquette du cinéma est également présentée, permettant de mieux appréhender les formes et le fonctionnement de cette œuvre. Divers documents de recherche sur la mythologie du soleil complètent toutes ces informations.
Enfin, une vidéo, Light & Space, esquisse des instantanés de vie de la ville de Mardin — des enfants qui jouent dans la rue, des scènes de bar, un quotidien à l’intérieur d’un foyer, les danses rituelles d’un mariage, ses clameurs, etc. — mêlés à la préparation du tournage, notamment les questionnements par rapport à l’emplacement de «Sun Cinema». Non commentée, la vidéo est souvent mystérieuse; autant que l’est certainement ce coin du monde multiethnique…
A l’instar de JR et de Marco qui avaient placardé des visages d’Israéliens du côté palestinien du mur et des Palestiniens du côté israélien, chaque personne exerçant le même métier qu’une autre de l’autre côté du mur (Face2Face, 2005), Clemens von Wedemeyer use de la culture comme soft power pour réconcilier les peuples autour de valeurs communes.
Oeuvres
— Clemens von Wedemeyer, Sun Cinema Project, View at Galerie Jocelyn Wolff, 2011.
— Clemens von Wedemeyer, Sun Cinema, Mardin, Turkey, 2010. Photographie couleur.