Stuart Pound
Les films de Stuart Pound font l’objet d’une première exposition personnelle à l’Espace Croisé, et investissent l’ensemble du plateau; après avoir été à maintes reprises diffusés dans la Saison Vidéo, ces dix dernières années. Les récentes vidéos sont réalisées à partir d’appropriations d’images de DVD de films hollywoodiens très connus, trouvés dans des magasins caritatifs à Londres.
Les trois vidéos Chase, 2012 — Run et Shooting Loops, de 2013 — conçues à partir de films de science-fiction ou de films d’action avec Arnold Schwarzenegger, retournent à la verticale ce qui était initialement horizontal. Elles compilent des bandes d’images et intensifient leur rythme en créant une nouvelle partition visuelle proche de l’abstraction. La bande sonore est scindée avec l’image en mouvement et crée un effet intense de réverbération.
La forme d’autres travaux dépend de leur musique. Dans Hopeless, 2014, la musique du groupe Evangelista est associée aux images redécoupées extraites du film de Georg Wilhem Pabst, Loulou (Die Büchse der Pandora /La boîte de Pandore): histoire d’amour sans espoir pour l’actrice Louise Brooks et sorti en 1929. Vampire bat, 2014, avec un autre morceau d’Evangelista reformule des images du Nosferatu de Friedrich Wilhelm Murnau, 1922, dans lequel Max Schreck tient le brillant premier rôle. Dans Postcard, 2009 — une carte postale érotique du début XXe siècle est utilisée pour une animation qui dévoile une jeune femme prenant la pose à côté d’un miroir. Dans cette appropriation et glissement, elle incarne Chloris (nymphe de la mythologie grecque dont le nom vient de chloros — vert), sollicitée dans la bande sonore, musique française, composée à la même époque par Reynaldo Hahn. Les variations de la tonalité du chant se matérialisent par une vague mauve qui se déplace et s’amplifie, concrétisant le lien entre l’image et le son et donnant une touche contemporaine à ces accords rendus possibles par la technologie.
Stuart Pound a aussi recyclé des images de ses propres films et vidéos. A woman from the past, much loved, 2012 — parlera à quiconque partage ce désormais quasi fétichiste amour de la pellicule. Des fragments de pellicule 16 mm noir et blanc sont visionnés avec un microscope connecté à un écran d’ordinateur. En réalité, c’est le support du film lui-même qui — dans ce lent balayage optique — est très apprécié bien plus que la femme, le sujet. Grandmother is a Crab, 2013 — récemment présentée dans l’exposition «La boutique obscure», a été conçue avec un poème de Rosemary Norman. Elle emprunte à une vidéo antérieure des images elles-mêmes tirées d’un film publicitaire d’une agence de voyage diffusé à la télévision. Le noir et blanc et les effets de miroir extraient les images de leur époque et leur donne tout à la fois éclat et distance. La voix off et les sous-titres proviennent du poème et introduisent la magie de l’univers d’un enfant à la plage.
Stuart Pound a une pratique du cinéma et des connaissances en informatique qu’il a combinées à l’arrivée de la vidéo numérique.