En l’honneur du réalisateur déjanté John Waters, la galerie Perrotin accueille des œuvres regroupées sous le thème d’Hollywood. Mais loin des paillettes et du consensus, les photographies et les peintures exposées sont à l’image du réalisateur décalé. Le décalage ici est le revers de la capitale du cinéma. Les coulisses ne sont jamais loin, mais c’est surtout l’envers du temple du septième art qui est montré.
Une photographie géante de Maurizio Cattelan accueille le visiteur. Elle date de la dernière biennale de Venise, où l’artiste a reconstitué les neuf lettres de la plus médiatisée des collines du monde. Son Hollywood a été reconstruit en Sicile pour l’occasion, et les riches collectionneurs transportés par charter. Contrairement à l’imagerie habituelle du lieu, l’image est prise de dos et en plongée. Le résultat est renversant autant mentalement que spatialement.
En face de cette immense photographie panoramique couvrant presque entièrement le mur, se trouve une peinture d’Ed. Ruscha de dimensions plus modestes et qui transgresse également l’imaginaire collectif. La couleur orange et rouge du couché de soleil inonde les lettres de la colline rebaptisée  » Halloween « . La référence appartient autant aux films d’horreurs et autres séries B, qu’elle se rapporte à la production indépendante et en marge de la grande industrie du film. Le reste de l’accrochage est ponctué de clichés montrant Los Angeles en dehors des lumières des sunlights.
Dans le second espace, l’exposition de groupe laisse place à une exposition consacrée au réalisateur iconoclaste. Dans son dernier film, Waters brocardait Hollywood. L’héroïne, une star de cinéma, se faisait enlever par un groupe appartenant au cinéma indépendant. Dans les œuvres présentées la même causticité est présente et le pastiche n’est jamais loin. L’accumulation de plusieurs scènes se passant aux toilettes est très drôle. Que ce soit John Travolta, tueur à gage, lisant un magazine dans Pulp Fiction de Tarantino, ou que ce soit Danny Glover affolé de ne pouvoir quitter son siège à cause d’une bombe placée en dessous de lui dans L’Arme fatale 2, les références connues ou inconnues fonctionnent. Ces caricatures qui sont autant d’hommages au cinéma, même si elles le maltraite, provoquent sourires et gloussements.
Ces énumérations cinématographiques, ces samples de films se présentent sous la forme de bandes oblongues, qui accumulent les photographies placées les unes à côté des autres. Mais Waters pousse plus loin le soucis de la caricature en allant jusqu’à travestir des personnages de films, en les affublant de perruques. Ce travail de récupération et de détournement fonctionne à la fois comme les papiers collés de Braque mais aussi comme les copier-coller des ordinateurs. Le fourre-tout que nous propose Waters est loin du zapping télévisuel, au contraire le spectateur assiste à une suite de sélections, à un choix qui aboutit à la construction de séquences pimentées.
John Waters
— Toilet Training, 2000. Photographie couleur. 22 x 170 cm.
—AA Sober, 2000. Photographie couleur. 22 x 116 cm.
— Straight to Video, 2000. Photographie couleur. 51 x 46 cm.
— Jackie’s Copies Divine’s Look, 2001. Poupée en vinyle, veste en jersey, pistolet jouet. 46 x 7,6 cm.
Ed. Ruscha
— Halloween, 1977. Acrylique sur toile. 56 x 204 cm.
Maurizio Cattelan
— Hollywood. Photographie couleur, plexiglas. 180 x 400 x 15 cm.