Les huit clichés de la série «Stage» de Rhona Bitner présentent une forme d’incertitude: scènes de théâtre (vues depuis la salle ou depuis le fond de la scène même?), rideaux de scène (qui se lèvent ou qui tombent?), plafonniers de théâtre (qui s’éteignent ou se rallument?) et le halo du projecteur éclairant la scène vide (début ou fin de spectacle?).
Rhona Bitner saisit la tension des marges, la durée suspendue de l’immédiatement avant et de l’immédiatement après du spectacle. Celui-ci ne peut pas revendiquer le monopole du contenu et de la densité du sens: il y a un «pro-jet» et un retrait de l’événement que constitue le spectacle, et ces fines pellicules de temps, en apparence vides de tout contenu objectif, sont en réalité pleines de l’attente pour ce qui est de l’avant, et du souvenir encore vif pour ce qui est de l’après.
Rhona Bitner donne ainsi une épaisseur psychologique et ontologique à ces «instants décisifs» dont elle décale la portée: elle ne cherche pas à saisir l’événement lui-même mais son avènement et sa disparition, dans cette zone trouble entre pénombre et lumière.
English translation : Nicola Taylor
Rhona Bitner
— Série «Stage», 1996-2005. Tirages chromogéniques ou Cibachromes sur aluminium. 122 x 122 cm et 25.4 x 20.3 cm.