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Splendeur et misère

Les sculptures de Saint-Clair Cemin, artiste brésilien, fonctionnent en tir groupé et ne gagneraient peut-être pas à être considérées une par une. La démarche de l’artiste consiste à fabriquer en série, à la chaîne, aurait-on dit autrefois, des statuettes qui se suivent et qui finissent par se ressembler ou s’annuler les unes les autres. Saint-Clair Cemin a fait son bonhomme de chemin sur la scène de l’art… «contemporain» en accumulant toutes sortes de fétiches qui semblent tout de même dater un brin.

Les danseurs tournent en rond et ressemblent à des «elephant men» ou, plus exactement, à des «elephant boys». Ils ont quelque chose de Shivas et de Ganesh, les fameuses divinités indiennes.

Dans la salle principale, on découvre une file, également indienne, composée d’aventuriers d’une Arche de Noé perdue, ayant l’air ravi de santons de la crèche, modelés dans les styles, les teintes, les phanies et les duretés les plus hétérogènes. Ils empruntent un sentier balisé par une longue toile cirée grise et donnent l’impression de marcher à la queue leu leu comme les écoliers d’antan, la bande à Basile ou à Bézu.

Chaque règne animal, chaque spécificité, chaque matérialité — marbre, bois, bronze, terre cuite ou plâtre — se perd dans ce vrac. Les individus se noient dans la masse. On repère le sens de leur longue marche qui va de cour à jardin. Inutile de dire que, comme dans toute sculpture d’avant l’ère (ou l’art) cinétique, la mobilité est ici feinte, simulée, esquissée.

Pour caractériser la manière de Saint-Clair Cemin, on pourrait dire que l’artiste fait dans la «bad sculpture», comme ses collègues faisaient dans la «bad painting» au sortir du minimalisme des années 70. Cette démarche est quelque peu dextrogyre, selon nous, formellement parlant — même s’il est hasardeux de classer ainsi des œuvres ou des démarches artistiques.

Le sculpteur a été influencé par… Giacometti, et il se borne, apparemment, à produire ou reproduire en quantité industrielle ses myrmidons de jardin avant de les mettre en scène, in situ, suivant la configuration des lieux d’exposition.

Face au kitsch qui se dégage de ces assemblées de personnages et de ces assemblages, on comprendra que certains puissent rester de marbre…

Les Ecoliers, 2010
—  «Splendeur et misère», 2010. Suite de 95 sculptures en matériaux divers

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