Jin Meyerson se sert des images tirées de magazines ou de photographies pour composer ses tableaux. Il s’en sert après avoir fait un certain nombre de manipulations. L’image initiale est déformée, complètement triturée pour ensuite servir de modèle à ses compositions bariolées.
Les formes sont combinées, tordues et malmenées dans tous les sens pour être déversées dans une grande vague qui emporte le tout. La peinture se déverse dans une marée de couleurs, prise dans les rayures d’un courant qui trace son lit. Elle se superpose en une multitude de strates qui glissent les unes sur les autres. Elles se frôlent et se touchent en s’hérissant comme électrocutées par l’électricité statique qui se dégage de la réaction.
L’agencement de tous ces tourments, de toutes ces nervures et autres marbrures se fait à l’aide de bosselés et de contours qui organisent l’espace pictural. Bien que les traits soient hachés et électrifiés, la toile se présente comme un plan de coupe géologique. Les couches se superposent dans une sorte de mille feuilles déstructuré. Difficile à partir de ces spirales de pouvoir reconnaître l’image de départ, tout est éparpillé, tout est tordu et malaxé.
Ces distorsions sont autant ramassées qu’éclatées. Tourbillonnante et grouillante la peinture apparaît en bouillonnant, elle émerge comme une émulsion, telle Vénus, elle apparaît d’une écume en forme de Splash. Il est difficile de définir cette chose qui explose et implose à la fois. La toile est à la fois pleine d’énergies et de mouvements. Comme un trait brossé à l’arc électrique, la peinture est fuyante à toute explication. Véritable labyrinthe, les traits de peinture sont des couloirs qui ne mènent nulle part, ils indiquent seulement des mouvements en spirale, en roue libre.
Cette version numérique de l’anamorphose donne un coup de jeune à ce genre développé au XVIe siècle. Les Ambassadeurs d’Holbein conservé à la National Gallery de Londres est un des plus fameux exemples du genre. Il faut se placer sur le côté du tableau pour découvrir ce qui se cache derrière cette tache qui encombre le centre. Sous un certain angle un crâne se laisse deviner par le spectateur chanceux. Chez Meyerson, on pourra tenter toutes les positions, essayer tous les angles de vue, on aura du mal à trouver le modèle d’origine.
Les compositions apparaissent d’un bloc, la toile est prise dans des creux et des pleins. Elles sont sinusoïdales, liées et aérées. La matière est lisse ou rugueuse, brillante ou mate. Les panneaux s’organisent comme des compositions aux parois amovibles et coulissantes. La peinture est tracée, fouettée, elle est tout en lacets électriques, irisée et hérissée à la fois.
Jin Meyerson
— Hot Wire, 2004. Huile et acrylique sur panneau carton. 243 x 307 cm.
— Chino Latino, 2004. Huile et acrylique sur panneau carton. 152,5 x 216 cm.
— Minor Threat, 2004. Huile et acrylique sur panneau carton. 152,5 x 216 cm.
— ST (Football base 2), 2004. Huile et acrylique sur panneau carton. 76,2 x 76,2 cm.
— Sideline, 2004. Huile et acrylique sur panneau de carton.122 x 152,5 cm.Â