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Slick 07, Olaf Rauh

PGalerie Mougin
@12 Jan 2008

Incorporant le mouvement de l’image vidéo à la photographie numérique, Olaf Rauh capte la trépidation de Paris à hauteur de passant, en condensant l’essence de la ville: vitesse quasi abstraite de la circulation sur fond d’enseignes commerciales hyperréalistes.

La manifestation Slick 07, du 19 au 22 octobre, permet de revoir quelques photographies de la série Code Paris d’Olaf Rauh, représenté par la galerie Jean-Luc et Takako Richard.

Le travail d’Olaf Rauh sur Paris nous donne une vision mouvementée de la ville. Il s’inscrit en cela dans une tradition qui remonte au milieu du XIXe siècle, aux origines de la vie moderne.
L’artiste adopte comme dispositif systématique, dans sa série Code Paris, créée en 2004, le cadrage d’enseignes de magasins, du trottoir d’en face, à hauteur de passant et le plus souvent dans la journée. Il saisit ainsi le flux de la circulation.

Dans les années 1930, Walter Benjamin considérait le cinéma, art de la vitesse et du foisonnement, comme un outil propre à appréhender la grande ville. Olaf Rauh, pour capter Paris, associe l’image vidéo projetée en mode accéléré et en mode ralenti à la photographie numérique, prise ensuite. Il en résulte une distorsion phénoménale des carrosseries de véhicules (voitures, cars ou motos).
En fonction des photographies, certains éléments métalliques restent visibles, imprégnant la scène d’une brutalité abstraite ou bien ils disparaissent dans de nombreuses stries qui zèbrent horizontalement l’image. L’artiste transmet, grâce aux capacités de la technologie récente du numérique, un condensé de vitesse qui métamorphose l’espace et sa perception.

Plus qu’une vision de la capitale, c’est l’essence de la ville contemporaine qui apparaît. On peut certes s’amuser à reconnaître les lieux, mais l’intérêt en est minime. Exit les monuments, les lieux emblématiques. Les enseignes commerciales surnagent sur le chaos automobile, comme seul ancrage possible du regard, seule certitude dans le flux général. On peut y voir une certaine ironie (quand bien même elle serait involontaire), le commerce, dans son essence, étant aussi associé au flux.

La captation du mouvement ne donne jamais lieu à une image tremblée. Le flux apparaît comme la valeur prédominante, qui marque véritablement l’image de son tempo. Le rythme de la ville. Rythme de la ville dont l’homme, curieusement, est exclu. L’artiste filme pourtant à hauteur de passant, mais le flux des véhicules a raison de celui-ci. Il est happé par la vitesse, comme si la ville était une entité abstraite, où l’être humain est superflu.

Parallèlement au procédé de création retenu, Olaf Rauh a choisi un tirage photographique de grande qualité, rendant avec précision les éléments et les couleurs, comme dans les images publicitaires. Un monde sur papier glacé.
Il en ressort deux impressions contradictoires : d’une part le flux des moyens de transport, saisi concrètement, entraîne la ville dans son mouvement, comme une sorte de mécanique des fluides ; d’autre part les enseignes colorées aguicheuses, seuls éléments stables, focalisent le regard, développant tout leur pouvoir d’attraction.

L’artiste a d’ailleurs souvent titré ses œuvres du nom correspondant au magasin photographié. Mais le flux de la circulation constitue une barrière infranchissable pour accéder aux commerces. On regarde mais on ne s’approche pas. La ville contemporaine, comme métaphore de l’apparence, univers clinquant et fuyant, où l’on ne sait plus où donner de la tête…

Sites : http://www.galerierichard.com

http://www.slick-paris.com

Olaf Rauh
— Minelli, 4/5, 2006. Photo lambda-print sur Ilford. 115 x 146 cm.
— Rouge, 1/5, 2004. Photo lambda-print sur Ilford. 115 x 146 cm.
— Jennyfer, 1/5, 2004. Photo lambda-print sur Ilford. 115 x 146 cm.
— Lancel 2, 2/5, 2004. Photo lambda-print sur Ilford. 115 x 146 cm.
— Joffo, 3/5, 2006. Photolambda-print sur Ilford. 115 x 146 cm.

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