Sgrafo vs Fat Lava, céramiques et porcelaines Made in West Germany, 1960-1980
Au travers d’objets utilitaires et décoratifs, présentés loin de toute hiérarchie, la collection privée de Nicolas Trembley nous fait découvrir une multitude de déclinaisons esthétiques qui se rattachent à une période à la fois prolifique et stylistiquement très libre, où le goût commun s’autorisait à être kitsch et délirant. Une époque d’avant la suprématie du design, qui formate dans une large mesure le monde dans lequel nous vivons et les objets qui nous entourent.
Cette exposition met en évidence certaines des problématiques qui sont, aujourd’hui encore, régulièrement discutées et qui touchent à cette réévaluation systématique entre l’art et sa fonction, entre l’art et le design, etc.
Elle interroge plusieurs notions: celle de l’évolution des formes et du goût, de l’unicité et de la multiplicité des objets, de leur production artisanale mais quasi industrielle, de la collection, ou encore de ce passage de l’objet courant à l’objet fétichisé.
Enfin, elle contribue à écrire l’histoire particulière et non encore historicisée de ces objets qui mêlent le bon et le mauvais goût, éclaire cet éternel aller-retour entre le goût dit «populaire» et sa récupération «vintage», pointe les effets de mode et repose aussi la question récurrente du décoratif et de l’artisanal et de leur déplacement plus ou moins récent dans le champ de l’art contemporain.
« Sgrafo vs Fat Lava » donne à voir avec légèreté, pour le plaisir des yeux et une sensation de déjà -vu, une nomenclature de formes et de couleurs plus gaie, cocasse et désinhibée que ne pourrait le proposer l’histoire de l’art telle qu’elle est abordée d’ordinaire.
L’esthétique de ces vases effleure le typique et même le folklorique; en parallèle, dans les années 1960–1980, les années les plus productives, l’esprit «seventies», de par le retour à la nature qu’il opère, a plutôt privilégié les effets de textures et les imitations de coquillages, d’écorces et de fossiles.
Même si d’autres formes plus minimales, inspirées du Bauhaus, étaient également déclinées et structuraient davantage l’architecture des objets (vases, pots à eau…), les motifs décoratifs restaient souvent plus proches du Pop Art et de l’Op Art que du Minimalisme.
On trouve également des pièces d’inspiration plus «futuriste», où l’utilisation d’émaux d’un blanc immaculé rappelle les créations de Pierre Cardin, les décors de Jacques Tati ou encore, pour les plus «Pop», les animations télévisuelles de Jean-Christophe Averty.