Hommage à un style fondateur de la danse hip-hop, le spectacle chorégraphique Wild Cat [chat sauvage], du chorégraphe Saïdo Lehlouh (Cie Black Sheep), rejoue le b-boying. Danse souple, acrobatique, déjouant la gravité… Il y a du chat qui se retourne et retombe sur ses pattes dans ces figures rapides et fluides. Souvent pratiqué en solo, le temps d’une fulgurance, le b-boying transforme son danseur en entité tourbillonnaire. Les pirouettes y sont parfaites, dans toutes les directions, y compris sur la tête. Une agilité pluridimensionnelle dont Saïdo Lehlouh accentue la dimension féline. Avec Wild Cat, il propose ainsi une pièce où la douceur, la caresse presque, fait du hip-hop une expérience de la suspension. Pour un spectacle mêlant danse hip-hop et danse contemporaine, interprété par cinq danseurs — Ilyess Benali, Evan Greenaway, Samir el Fatoumi, Timothée Lejolivet, Hugo de Vathaire (distribution évolutive).
Wild Cat de Saïdo Lehlouh (Cie Black Sheep) : la sensualité du b-boying des 1990s
Occultant l’image de violence associée au genre hip-hop, Wild Cat en dévoile la finesse. La pièce met en lumière la french touch, que Saïdo Lehlouh traduit habilement par « toucher français ». Dans la pièce Wild Cat affleurent ainsi intimité et sensualité. Sur des sonorités électro-hip-hop du compositeur Awir Leon. Et travaillant souvent avec des chorégraphes (Amala Dianor, Emanuel Gat…), Awir Leon cultive des ambiances poétiques, tantôt mélancoliques, tantôt amnésiques. Une légèreté qui s’accorde bien avec la délicatesse du spectacle. Si la pièce renoue avec le style de b-boying développé par la scène parisienne dans les années 1990 — style souvent décrit comme « finesse » par les danseurs américains —, la musique d’Awir Leon en change le contexte. Pour un moment de suspension où seule la danse fait code.
Entre danse hip-hop et danse contemporaine : une danse féline, tout en finesse
Sur scène, les danseurs sont vêtus de façon relativement neutre — jeans, t-shirt, baskets, dans des tons sobres (nuances de gris, de terre). Une façon de défendre ce qui aura également nourri le b-boying : un éloignement du break, devenu trop commercial. Si chaque danseur déploie tour à tour des morceaux d’excellence, c’est pour mieux être porté par un groupe. Un groupe qui le suit alors, comme magnétisé. Formant un ensemble cohérent, où chacun prend le relais de l’autre. Structure souple : les interprètes vont et viennent au gré des énergies (y compris dans la distribution). Et le spectacle peut tout autant se jouer sur la scène d’un théâtre que sur une place publique. Laissant l’égocentrisme (ou personal branding) au vestiaire, Wild Cat intensifie la sensualité du hip-hop. Pour un moment chorégraphique à savourer au gré des représentations — gratuites, et en plein air, dans le cadre des June Events 2018.