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Sacha

«Et quand il est juste témoin d’un choc violent, qu’est-ce qu’il sécrète, le cerveau?» Sacha, le chat du vieux Cornélius, vient de se faire écraser sous les yeux d’un oiseau philosophe  et de son compagnon, animal hybride en quête d’identité. Voici le point de départ de Sacha, le nouvel opus de Charles Berbérian.

Information

Trois parties constituent cette histoire. Dans la première on y croise plutôt Irène — qui vit dans la maison de Sacha, dans la seconde, plutôt Pierre — le mari d’Irène, et plutôt Cornélius, le propriétaire de Sacha, dans la dernière partie.

«Plutôt» car les pérégrinations de l’oiseau et du chat-chien viennent s’immiscer au détour des pages comme un fil rouge. Cette construction cinématographique conduit Charles Berbérian à dessiner plusieurs fois le même événement avec un point de vue différent.

Autant d’occasion de retours en arrière et de passages à d’autres rêveries. Ainsi, petit-à-petit les liens entre les personnages, les liens entre leur histoire et le présent du récit se livrent. Ils se livrent même d’autant mieux à la seconde lecture…

Comme cette façon que le récit a de se tisser, les pages ne sont jamais nettement ni régulièrement découpées en cases, en particulier pour laisser la place aux rêves, où plusieurs moments se juxtaposent allégrement. Les traits de Charles Berbérian sont comme des fils souples et solides, ils varient et ne se fondent que rarement dans leur masse: il n’existe pas d’à-plats dans ces pages, le trait noir se distingue tout le temps, quitte parfois à dessiner une ambiance gribouillée, perturbée, à malmener les personnages ou à découvrir leurs âmes bouleversées ou brouillonnes.

La ville est ainsi grise, foisonnante, agressive, inamicale, et les paysages naturels, les intérieurs, les dialogues légers la contrebalancent à peine.

Car il faut s’accrocher, tout de même, à la lecture de Sacha. Mieux vaut que le ciel soit bleu au dehors et dans sa propre tête, car l’à-quoi-bonisme et la mélancolie qui se dégagent de cet ouvrage peuvent plomber une atmosphère personnelle.

Ce serait pourtant s’arrêter trop tôt dans cette lecture, car au détour d’un bon mot, du geste final et salvateur de Cornélius, de digressions sur une sonde spatiale, de petits trésors surgissent, qui ont, quant à eux, le pouvoir de colorer à nouveau un ciel: «Tu viens de tomber de haut sans te casser en miettes, tout va bien, non ?»

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