Les environnements extrêmes sont ceux qui, anciennement habités, ont dû être abandonnés suite à une pollution majeure ou des choix économiques drastiques ou au contraire ceux qui, inhabités, peuvent possiblement s’ouvrir à une installation humaine grâce au développement des technologies, qu’ils soient terrestres (Antarctique notamment) ou extraterrestres.
L’exploration de ces environnements par les artistes résonne comme une tentative de rééquilibrage de la présence humaine sur terre, voire au-delà , en réponse aux bouleversements climatique et environnementaux.
La présence récurrente de cylindres ou hublots dans les œuvres présentées, tout en mettant le vivant à distance en un simulacre d’observation scientifique, semble préfigurer nos vies futures comme une mise en garde, à la fois confinées dans un cocon aseptisé et protégées d’un environnement devenu néfaste : pour survivre, faudra-t-il s’en abstraire?
Pour Altitude Zero de Hu Jie Ming (2006), deux portes rouillées munies d’un hublot à hauteur de regard laissent voir la mer sur fond de côte urbanisée. De nombreux déchets surgissent entre deux eaux, en fonction de l’avancée du spectateur, acteur impuissant et quelque peu culpabilisé de la pollution marine.
The Martian Rose (2007-2009) d’Howard Boland et Laura Cinti oppose au rêve de vie extraterrestre la dureté de la réalité expérimentale: une rose, choisie comme archétype culturel, exposée dans un hublot par simulation à l’atmosphère martienne, n’y résiste pas, tuant dans l’œuf tout romantisme.
A l’opposé, l’installation de Shiro Matsui, EPO4 – Dewey’s Forest (2009), expérimente le développement d’un jardin miniature en apesanteur, en vue de sa disposition dans une station spatiale: une couronne végétale dans un cylindre hermétique tourne en permanence sur deux axes. Une petite caméra retransmet les images captées à 360° dans un petit local blanc utérin, donnant l’impression au spectateur d’être lui-même sous cloche.
Ana Rewakowicz fait, elle, un lien saisissant entre urbain et spatial, aujourd’hui et demain, avec sa robe-habitat (SleepingBagDress Prototype II, 2004-2005): en plastique transparent couvrant des pieds à la tête, la tenue se transforme en bulle où l’artiste se couche dans la rue.
Création d’un mini espace privé dans l’espace public suscitant contre toute attente le dialogue, elle évoque la condition des SDF dans la ville, comparée à la solitude des astronautes dans leur fusée, interrogeant la notion d’extrême dans notre environnement quotidien.
Une conférence sur «Les Enjeux géopolitiques des ressources énergétiques de la zone arctique», organisée le mercredi 16 septembre à 18h à la Maison Européenne de la Photographie, introduit dans le Festival ce que les artistes ont volontairement laissé de côté en privilégiant une démarche buissonnière.
www.art-outsiders.com
Howard Boland & Laura Cinti
— The Martian Rose, 2007-2009. Installation mixed media.
Shiro Matsui
— EPO4 – Dewey’s Forest, 2009. Installation mixed media, version originale pour @rt Outsiders 2009.
Hu Jie Ming
— Altitude Zero, 2006. Installation vidéo interactive.
Ana Rewakowicz
— SleepingBagDress Prototype II, 2004-2005. Installation et vidéo.
Publications
— Catalogue Festival @rt Outsiders 2009. (In)habitable ? L’art des environnements extrêmes, MEP, Paris, 2009.
Article sur l’exposition
Nous vous incitons à lire une extension de cet article par Evelyne Bennati sur cette exposition en cliquant sur le lien ci-dessous.
critique
@rt Outsiders, (In)habitable – Critique 1