L’exposition « Quelque part dans le désert » au Musée d’Art moderne de la Ville de Paris réunit des photographies et des vidéos de Ron Amir, jeune photographe israélien dont l’œuvre brouille les frontières entre l’art et l’action politique.
Les photographies de Ron Amir, entre art et action politique
L’exposition rassemble trente photographies en couleurs grand format et six vidéos, réalisées par Ron Amir de 2014 à 2016 à Holot, un centre de détention à ciel ouvert, situé dans le désert du Néguev et aujourd’hui fermé, où Israël retenait des réfugiés originaires pour la plupart d’Erythrée et du Soudan. Ces migrants illégaux ayant fui leur pays pour échapper à la terreur et à l’oppression qui y régnaient n’étaient pas autorisés à vivre ou travailler en Israël. S’il leur était permis de se déplacer hors du centre durant la journée, ils devaient pointer matin et soir.
A travers les photographies et vidéos réunies sous le titre « Quelque part dans le désert », Ron Amir témoigne des activités de jour de ces réfugiés. Ses images révèlent comment, isolés en plein désert et sans ressources, ils ont réussi à développer une vie quotidienne et commune. Le cliché intitulé Muawyiah’s Place montre des objets de récupération faisant office de siège et de table sous un arbre chargé de sacs et d’autres outils du quotidien à la manière d’une étagère, dans celui intitulé Kitchen (front view), on voit un carton plié sur un tas de tissus à côté duquel est posée une poêle, dans Stall (Closed), le titre laisse deviner un stand fermé, simplement constitué de grands tapis rabattus autour d’un arbre frêle.
« Quelque part dans le désert » : Ron Amir photographie le camp de Holot
Dénuées de toute présence humaine, les photographies de Ron Amir ne montrent pas directement les migrants mais dévoilent, à travers la capacité de ces derniers à construire des lieux communautaires et des équipements à partir de cailloux, de bâtons, de sable, de pierres ou d’objets abandonnés, leur créativité, leur sensibilité et leur instinct de survie. Ces œuvres témoignent de la démarche singulière de Ron Amir, qui s’engage dans des projets à long terme à forte dimension sociale.
Le travail de Ron Amir, s’il tend à gommer les limites entre art et engagement politique et social, ne s’inscrit pas dans la photographie documentaire traditionnelle. Elles relèvent en effet autant de la métaphore que du document, puisqu’elles témoignent simultanément d’une détresse sociale et de la grande créativité des individus qui la subissent.