L’exposition « Le monde selon Roger Ballen » à la Halle Saint Pierre, à Paris, constitue, pour la première fois en France, une véritable rétrospective de l’œuvre d’un des photographes majeurs de sa génération. Le style unique de cet artiste sud-africain, qu’il définit lui-même comme « ballenesque » renvoie de façon crue le versant le plus sombre de la condition humaine : l’absurdité de l’existence et du monde et la confusion voire la folie qui en résultent.
« Le monde selon Roger Ballen » à la Halle Saint Pierre
Le choix de l’artiste de présenter son œuvre à la Halle Saint Pierre n’est pas fortuit : ce lieu dédié à l’art brut et aux formes créatives hors normes correspond en effet parfaitement à la vision artistique de Roger Ballen. Indépendante de toute mode artistique, la pratique de ce dernier et son esthétique sont profondément liés à l’art outsider et s’inscrivent dans un rapport à la création qui s’enracine dans les couches profondes de l’être humain, à la manière de l’art brut.
Plus grande rétrospective de l’œuvre de Roger Ballen
L’exposition, plus grande présentation du travail de Roger Ballen en cinquante ans de carrière, réunit ses photographies, ses installations et sa propre collection d’art populaire. Elle met en lumière son évolution, des images des villes sud-africaines rurales décrépies qu’il capte en 1986 pour la série Dorps, Small Towns of South Africa, métaphore visuelle d’une culture mourante, à ses récentes installations dans lesquelles le dessin, la peinture, le collage et différentes techniques sculpturales viennent compléter la photographie en noir et blanc pour générer une nouvelle esthétique hybride.
Les photographies de Roger Ballen, métaphores de la condition humaine
Les photographies de la série Platteland de 1994 montrent dans leur vie quotidienne les victimes des problèmes politiques, économiques et raciaux qui touchent le monde rural pendant l’Apartheid. Ces images, dépassant les événements historiques et la simple valeur documentaire et sociale, scrutent les profondeurs de l’âme humaine et transfigurent par l’art les désordres physiques et psychiques qu’elles captent. Navigant entre de plus en plus entre réalité et fiction à partir de la fin des années 2000, les expérimentations visuelles de Roger Ballen esthétisent ici le réel, là l’inconscient, pour rendre palpable le sentiment de confusion que porte l’homme face à un monde irrationnel.