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Rirkrit Tiravanija

Rirkrit Tiravanija a présenté au Musée d’art moderne de la Ville de Paris/ARC Une Rétrospective (Tomorrow is Another Fine Day) du 10 février au 20 mars 2005. Paris-art.com l’a rencontré à cette occasion.

Sa prochaine exposition est prévue à la Serpentine Gallery de Londres en juillet, sa prochaine venue en France à l’occasion de la Biennale de Lyon, sans doute en collaboration avec Philippe Parreno.

Paris-art.com. D’où vient l’idée de cette exposition-rétrospective?
Rirkrit Tiravanija. L’équipe du Musée d’art moderne de la Ville de Paris est venue me trouver pour faire cette rétrospective. Cela m’a tout de suite intéressé parce qu’il s’agit, étant donné le type d’«œuvres» que je crée, d’un exercice difficile.

Cette exposition est-elle plus une réflexion sur les possibilités des espaces artistiques que sur votre travail ? Pourquoi avoir repris le titre d’une de vos anciennes installations, Untitled 1996 (Tomorrow Is Another Day), montrée à la Kölnischer Kunstverein ?
Les deux. Mon travail explore à chaque fois les possibilités d’utilisation de l’espace muséal. L’œuvre est aussi un travail sur le travail lui-même. Quant au titre, celui-ci est légèrement différent de ma précédente exposition. Il m’a été inspiré par l’auteur de science-fiction, Bruce Sterling, dont un texte est partie intégrante de l’exposition, Yestersay Will Be Another Day. Ce titre a déjà été utilisé plusieurs fois dans un sens un peu différent, tout en gardant à chaque fois le même esprit.

Peut-on dire que cette exposition est fondée sur une approche déceptive, surprenante, que le visiteur doit surpasser afin d’y participer et de l’actualiser ? Avez-vous voulu jouer avec votre image et ce que le public attend de vous, devenant comme le «fantôme» de cette rétrospective ?
Bien sûr, chaque exposition provoque un sentiment d’attente vis-à-vis de l’artiste et de ce qui lui est associé. Trouver une façon de questionner cette attente et cette relation entre l’artiste et le public m’intéresse.
Il est vrai que le regardeur s’engage plus dans la visite de l’exposition lorsqu’il doit solliciter sa capacité d’écoute et d’attention, lorsqu’il doit convoquer esprit et expérience pour ressentir ce qu’il a lui-même été amené à vivre.
J’ai toujours travaillé sur le sentiment d’attente vis-à-vis de l’auteur. Dans mes travaux précédents, mon rôle, en tant qu’artiste, a toujours été de déplacer l’autorité du créateur. Et ici, encore une fois, cela devient une composante importante de ma condition de «fantôme».

Peut-on parler de Tomorrow is Another Fine Day comme d’une opération de dématérialisation pour un retour de la voix et de l’investissement, lorsque les choses et les œuvres d’art ne sont plus là et que les visiteurs ont alors besoin de les nommer et de s’en souvenir ?
En effet. C’est le sens de mon intervention. J’ai été très certainement intéressé par le processus de dématérialisation de l’objet et par la montée en puissance de l’expérience du regardeur. Selon moi, le sens de l’art peut être trouvé plus par la «vision» que par un usage réflexif.

Est-ce une réflexion sur le temps et le sentiment nostalgique, comme l’est l’intervention de Philippe Parreno dans l’exposition ?
Je n’ai pas le temps d’être nostalgique. Je ne suis pas intéressé par le passé mais plutôt par ce qui va arriver et ce qu’il faut que je fasse pour en être le catalyseur. Bien sûr, je veux que les visiteurs se souviennent de cette exposition mais non d’une manière nostalgique. Il s’agit d’un acte de mémoire et non d’un désir de voir le passé redevenir présent dans l’avenir.

Selon vous, que va-t-il rester de l’exposition, une fois terminée?
Je crois que l’espace et les structures vont rester. Les Cordeliers vont garder l’architecture pour les prochaines expositions.

Entretien réalisé par échange de mails et traduit par Clément Dirié en avril 2005.

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