Valérie Jouve
Textes de Jean-Pierre Rehm, Michel Gaillot, Christine Breton
Résonances
«J’ai construit ce livre comme une promenade, une déambulation à travers des villes que j’ai traversées, à travers un monde; je l’ai voulu comme un voyage au moyen d’images dont la rencontre, sans autre information que celle de leur présence, articule des espaces visuels, de même qu’une musique peut, par le biais de la composition, mettre notre corps en mouvement. Les résonances que j’ai cherché à mettre en œuvre entre les images traduisent un regard sur une époque, un rapport au monde et surtout l’idée que la rencontre est, par essence, une mise en mouvement du monde.
C’est cet intérêt pour la compréhension du vivant qui m’a d’abord conduite vers des études en sociologie et ethnologie, puis vers la photographie, non comme un acte artistique énoncé, mais comme la nécessité de comprendre le lien entre une gamme très étendue d’attitudes et les réalités phénoménologiques de la vie sociale.
Ma ville est une ville populaire. Les hommes et les femmes avec qui je travaille ont encore cette conscience et cette fierté particulière d’appartenir à ce corps collectif qu’on appelle le peuple. C’est avant tout une forme de culture, une forme d’éthique et de dignité. Mais notre époque voit ce corps disparaître. Dans mon travail j’ai nommé ces survivants « Les Personnages ». Je photographie ceux que je rencontre, que je croise, qui me parlent. Ils ont une parole qui sait dire ce qu’ils ne veulent pas.
Contrairement à mes accrochages, j’ai fait le choix pour ce livre de révéler l’identité des lieux de mes images.
J’ai besoin de la dimension physique de l’expérience. J’aime amener le regardeur à voir l’image avec son ventre. J’éprouve ce besoin fondamental de dépasser l’entendement commun du monde, sa représentation mentale figée, pour le remettre en mouvement. C’est ce qui a conditionné toute ma recherche et ma relation à l’outil photographique.
(Je choisis) de terminer ce livre aux villes occidentales sur lesquelles j’ai travaillé depuis 20 ans.»
Valérie Jouve
Valérie Jouve, née en 1964, suit une formation d’ethnologie et devient photographe sans pour autant oublier sa formation première comme le montre ses mises en scène photographiques – «images jouées» ou «performées» — où elle décrypte notre société et ses aspects de théâtralité quotidienne.