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Rencontres 7 : Lawrence Weiner

Un entretien avec Lawrence Weiner en couverture et les pages intérieures pour présenter son travail basé sur les mots et le langage. Photographies, installations, extraits de livres, notes de travail montrent un large éventail de la production de cet artiste inclassable.

Information

  • @2002
  • 22-913355-10-2
  • \non précisé€
  • E32
  • ZNombreuses, en couleurs et en noir et blanc
  • 4français, anglais
  • ~24 x 17 cm
  • }17 cm L - 24 cm H
  • \Acheter ce livre en ligneb

Par Lawrence Weiner et Frank Perrin (extrait de l’entretien)

FP. Ton conducteur est strictement le langage mais ton expression est finalement très diverse: cinéma, vidéo, musique, posters, livres… Ta pratique est en fait très ouverte ?

LW. Pratique c’est un mot absolument joli, vraiment, pratique. Pour les artistes, comme pour les intellectuels, aujourd’hui la nécessité c’est la communication. Un petit film, ou une chanson, c’est la possibilité pour moi de parler de questions liées à des réalités multiples, de celle du positionnement social dans notre société, mais en même temps cela reste une chanson. C’est une liberté, professionnelle, mais une liberté.

FP. Au-delà de la spécificité de l’art conceptuel, la force de ton travail c’est d’avoir proposé des usages, des modes d’emploi. C’est-à-dire que finalement l’œuvre est une chose ouverte et qu’elle vit dans les usages qu’on en fait.

LW. Mais pas ouverte à toutes les utilisations. J’ai tenté de faire tout mon travail « bastard proof », comme un briquet est « child proof ». Mon travail est complètement « bastard proof », contre l’utilisation dans des contextes extérieurs et toutes sortes de récupérations possibles, politiques ou économiques. Mon travail se veut absolument sans stratégie, c’est d’abord une nécessité pour moi. Je suis un membre de la société et j’ai fait le choix de ce chemin pour moi, pour mon travail. Pour moi, cela n’a rien à voir avec l’idée de liberté, ou l’idée du courage, c’est une idée, oui, que je trouve intéressante.
Une grande partie de mon public, ce sont des ouvriers, comme en Angleterre, où j’ai eu plusieurs commandes dans le Nord. Tous les gens sont très contents, comprennent complètement, et l’utilisent. L’art est bourgeois peut-être, avec ses « où est le certificat ? », « où est le proof ? », « quelle est la valeur ? ». La valeur reste dans l’utilisation. En anglais « If it’s worth stealing, it’s worth buying », c’est très simple, ce n’est pas compliqué. Et j’ai pris la décision dans les années 60 de ne pas accepter l’idée de règles établies. Le règlement c’est quoi, un certificat ? non, s’il existe, il est là, il est sur la table, ça suffit.

Ta méthode de travail a toujours été très indépendante ?

Plutôt que le support et la structure de l’académie, du musée, je préfère toujours le support privé. Quand je fais le travail pour une personne en particulier, cette personne comprend les valeurs du travail personnellement, le reste c’est autre chose, c’est du romantisme. L’art ce n’est pas une question de protection, l’art ce n’est pas fait pour protéger, l’art c’est une question d’appréciation de la production des autres, d’appréciation de l’histoire. C’est une question toujours, c’est pas une réponse. Les artistes qui ne proposent que des solutions font de l’art une profession, qui, à la fin, crée pour les gens une situation réactionnaire, protégée. C’est un peu comme les Amish. C’est en fait complètement exotique.

(Texte publié avec l’aimable autorisation des éditions Images modernes)